Christophe André et la méditation en pleine conscience
Médecin psychiatre, auteur de nombreux best-sellers, Christophe André médite aussi depuis des années et pratique la pleine conscience. Cette méthode apprend à vivre ancré dans la réalité, en étant pleinement attentif à l’instant présent. Ses effets sur le stress sont désormais reconnus. Christophe André revient sur ces bienfaits.
Pourquoi tant de personnes s’intéressent aujourd’hui à la pleine conscience ?
La vogue de la pleine conscience repose sur les manques liés à nos modes de vie : manque de temps, manque de calme, de lenteur, de continuité. Pratiquer la pleine conscience permet de s’offrir ces moments de calme et permettre à notre cerveau de fonctionner à nouveau dans sa globalité et non sur un mode fragmenté et réactif.
Nos grands-parents avaient-ils, grâce à leur mode de vie plus lent, un avantage fondamental sur nous ?
Au-delà de nos grands-parents, nos ancêtres avaient probablement des existences où de pareils moments leur étaient plus souvent offerts. Les déplacements étaient plus lents, les journées moins remplies… Cela devait leur laisser plus de temps pour regarder passer les nuages et écouter le chant des oiseaux. Cependant, il ne faut pas idéaliser le passé. Nous avons quelques avantages sur les humains d’autrefois, et le progrès est une chose fabuleuse. Mais il comporte aussi des inconvénients dont nous avons à nous protéger, comme le risque de superficialité par excès de rapidité.
Est-il facile de s’initier à la pleine conscience ?
Oui, la pleine conscience est aujourd’hui de plus en plus accessible : la littérature sur le sujet est abondante, et il existe de nombreux stages et séminaires d’initiation. Il n’y a ainsi plus besoin de rentrer dans une pratique zen ou bouddhiste pour découvrir la pleine conscience. Bien qu’elle s’inspire de techniques du bouddhisme, elle est parfaitement laïque. C’est devenu, pour qui le souhaite, un élément de développement personnel ou de soin, sans aucune dimension religieuse ou philosophique (même si ces dimensions n’empêchent nullement d’approfondir une approche authentique de la pleine conscience).
Vous vous définissez comme un chrétien inspiré du bouddhisme. Quel lien y a-t-il entre prière et pleine conscience ?
La pleine conscience peut aider la prière. La prière suppose une croyance en un dieu et l’intention de lui demander quelque chose ou de le remercier. Il faut être présent, corps et âme, pour la vivre intensément : on ne prie pas en regardant son portable, en lisant le journal ou en surveillant sa montre. La pleine conscience nous apprend à être vraiment présents à ce que nous faisons et à ce que nous vivons. En cela, elle peut intensifier notre prière, mais aussi notre rapport aux autres et tous les instants de notre vie, pourvu que nous soyons attentifs à nous mettre sur ce registre.
Pratiquer la pleine conscience nous permet-il d’atteindre des états de grâce ?
Il est vrai que l’on peut atteindre de temps en temps des moments très agréables, et parfois des états modifiés de conscience, dont ces états de grâce font partie. Mais on ne peut pas vendre la pleine conscience avec ce genre de promesses ! Ce qu’elle nous apporte, c’est, je crois, de mieux savourer ce que la vie nous donne, de vivre tous ces moments importants de notre vie, que ce soit une conversation avec un ami ou un jeu avec ses enfants, au lieu de se projeter continuellement dans le futur. Ça, c’est déjà beaucoup. L’autre bénéfice de la pleine conscience, c’est qu’elle nous aide à ne pas nous noyer dans nos souffrances, nos difficultés.
Peut-on dire que la pleine conscience aide à renforcer notre spiritualité ?
Ça peut être le cas, mais ce ne sera pas forcément dans un aspect religieux. La pleine conscience peut nous aider à nous connecter à ce qui nous dépasse : la beauté, l’infini, le sens de la vie et de la mort, l’univers, la nature… C’est le champ de la spiritualité laïque.
Les enfants sont-ils plus disposés que les adultes à vivre en pleine conscience ?
Observez un petit enfant : vous remarquerez qu’il vit pleinement et intensément l’instant présent. Par exemple, lorsqu’il joue, il est entièrement dans son jeu. De même, lorsqu’il est triste, il est entièrement dans son malheur. Mais notez qu’un enfant peut être très vite consolé. Les états émotionnels peuvent se succéder chez lui très rapidement. Finalement, je dirais que les humains ont au départ des capacités de pleine conscience. Ils les perdent dès lors qu’ils acquièrent la capacité d’anticiper, puisqu'à partir de là, ils ne sont plus uniquement et entièrement dans l’instant présent.
La pleine conscience peut-elle s’enseigner aux enfants ? Leur est-elle utile ?
Actuellement, il y a des travaux de recherche pour adapter les méthodes de pleine conscience aux enfants. Je pense que c’est un service à leur rendre que de leur apprendre à poser leur esprit, par exemple lorsqu’ils ont du mal à s’endormir ou lorsqu’ils sont stressés par l’école. Certains enfants présentent des problèmes d’anxiété dès l’âge de 6 ou 7 ans à cause de leur tempérament et des pressions que la société met sur eux.
Serait-ce le rôle de l’école que de proposer cette formation à la pleine conscience ?
Ce serait bien que l’école puisse proposer une initiation à la pleine conscience. Malheureusement, les enseignants ont déjà tellement à faire avec la pédagogie, l’instruction et parfois même l’éducation des élèves qu’on ne peut pas leur en demander trop ! Il y a cependant des initiatives intéressantes. Par exemple, aux Pays-Bas, les professeurs qui le souhaitent peuvent recevoir une formation à la pleine conscience pour apprendre à leurs élèves à se calmer et à se concentrer. Il n’est donc pas impossible qu’un jour, l’initiation à la pleine conscience devienne une des missions des enseignants, ou puisse du moins être proposée dans le cadre de l’école.
Enfin, Christophe André, dévoilez-nous quelques secrets de psy pour vivre avec une âme sereine?
Cela remplirait plusieurs ouvrages, surtout dans mon cas ! D’ailleurs, tous mes livres sont destinés bien sûr à mes lecteurs mais aussi à moi-même. Il me semble, pour ne pas être trop long, qu’il y a actuellement dans ma vie quatre grandes directions dont je m’efforce de ne jamais trop m’éloigner.
- La première concerne le rapport aux écrans : ne pas les laisser envahir notre existence ; ne pas commencer et finir ses journées sur l’ordinateur, ne pas répondre au téléphone si on parle à un véritable humain en face de soi (les répondeurs sont fait pour ça), ne consulter ses mails que par intervalles et pas en temps réel, fuir Twitter comme la peste...
- La deuxième, c’est le lien avec la nature : à parcourir et à contempler chaque jour ; pas une journée sans sa petite dose de verdure, de contemplation du ciel, d’un fleuve, de la mer, de la montage…
- La troisième, c’est l’apaisement émotionnel, par la pratique quotidienne d’un petit temps de méditation, de yoga, de marche méditative, ou de toute autre technique pacifiante.
- La quatrième, c’est l’amour du genre humain : douceur avec nos proches et nous, gentillesse et altruisme avec tout le monde.
Ce n’est pas si compliqué, finalement…
Médecin psychiatre, auteur de nombreux best-sellers, Christophe André médite aussi depuis des années et pratique la pleine conscience. Cette méthode apprend à vivre ancré dans la réalité, en étant pleinement attentif à l’instant présent. Ses effets sur le stress sont désormais reconnus. Christophe André revient sur ces bienfaits.
Pourquoi tant de personnes s’intéressent aujourd’hui à la pleine conscience ?
La vogue de la pleine conscience repose sur les manques liés à nos modes de vie : manque de temps, manque de calme, de lenteur, de continuité. Pratiquer la pleine conscience permet de s’offrir ces moments de calme et permettre à notre cerveau de fonctionner à nouveau dans sa globalité et non sur un mode fragmenté et réactif.
Nos grands-parents avaient-ils, grâce à leur mode de vie plus lent, un avantage fondamental sur nous ?
Au-delà de nos grands-parents, nos ancêtres avaient probablement des existences où de pareils moments leur étaient plus souvent offerts. Les déplacements étaient plus lents, les journées moins remplies… Cela devait leur laisser plus de temps pour regarder passer les nuages et écouter le chant des oiseaux. Cependant, il ne faut pas idéaliser le passé. Nous avons quelques avantages sur les humains d’autrefois, et le progrès est une chose fabuleuse. Mais il comporte aussi des inconvénients dont nous avons à nous protéger, comme le risque de superficialité par excès de rapidité.
Est-il facile de s’initier à la pleine conscience ?
Oui, la pleine conscience est aujourd’hui de plus en plus accessible : la littérature sur le sujet est abondante, et il existe de nombreux stages et séminaires d’initiation. Il n’y a ainsi plus besoin de rentrer dans une pratique zen ou bouddhiste pour découvrir la pleine conscience. Bien qu’elle s’inspire de techniques du bouddhisme, elle est parfaitement laïque. C’est devenu, pour qui le souhaite, un élément de développement personnel ou de soin, sans aucune dimension religieuse ou philosophique (même si ces dimensions n’empêchent nullement d’approfondir une approche authentique de la pleine conscience).
Vous vous définissez comme un chrétien inspiré du bouddhisme. Quel lien y a-t-il entre prière et pleine conscience ?
La pleine conscience peut aider la prière. La prière suppose une croyance en un dieu et l’intention de lui demander quelque chose ou de le remercier. Il faut être présent, corps et âme, pour la vivre intensément : on ne prie pas en regardant son portable, en lisant le journal ou en surveillant sa montre. La pleine conscience nous apprend à être vraiment présents à ce que nous faisons et à ce que nous vivons. En cela, elle peut intensifier notre prière, mais aussi notre rapport aux autres et tous les instants de notre vie, pourvu que nous soyons attentifs à nous mettre sur ce registre.
Pratiquer la pleine conscience nous permet-il d’atteindre des états de grâce ?
Il est vrai que l’on peut atteindre de temps en temps des moments très agréables, et parfois des états modifiés de conscience, dont ces états de grâce font partie. Mais on ne peut pas vendre la pleine conscience avec ce genre de promesses ! Ce qu’elle nous apporte, c’est, je crois, de mieux savourer ce que la vie nous donne, de vivre tous ces moments importants de notre vie, que ce soit une conversation avec un ami ou un jeu avec ses enfants, au lieu de se projeter continuellement dans le futur. Ça, c’est déjà beaucoup. L’autre bénéfice de la pleine conscience, c’est qu’elle nous aide à ne pas nous noyer dans nos souffrances, nos difficultés.
Peut-on dire que la pleine conscience aide à renforcer notre spiritualité ?
Ça peut être le cas, mais ce ne sera pas forcément dans un aspect religieux. La pleine conscience peut nous aider à nous connecter à ce qui nous dépasse : la beauté, l’infini, le sens de la vie et de la mort, l’univers, la nature… C’est le champ de la spiritualité laïque.
Les enfants sont-ils plus disposés que les adultes à vivre en pleine conscience ?
Observez un petit enfant : vous remarquerez qu’il vit pleinement et intensément l’instant présent. Par exemple, lorsqu’il joue, il est entièrement dans son jeu. De même, lorsqu’il est triste, il est entièrement dans son malheur. Mais notez qu’un enfant peut être très vite consolé. Les états émotionnels peuvent se succéder chez lui très rapidement. Finalement, je dirais que les humains ont au départ des capacités de pleine conscience. Ils les perdent dès lors qu’ils acquièrent la capacité d’anticiper, puisqu'à partir de là, ils ne sont plus uniquement et entièrement dans l’instant présent.
La pleine conscience peut-elle s’enseigner aux enfants ? Leur est-elle utile ?
Actuellement, il y a des travaux de recherche pour adapter les méthodes de pleine conscience aux enfants. Je pense que c’est un service à leur rendre que de leur apprendre à poser leur esprit, par exemple lorsqu’ils ont du mal à s’endormir ou lorsqu’ils sont stressés par l’école. Certains enfants présentent des problèmes d’anxiété dès l’âge de 6 ou 7 ans à cause de leur tempérament et des pressions que la société met sur eux.
Serait-ce le rôle de l’école que de proposer cette formation à la pleine conscience ?
Ce serait bien que l’école puisse proposer une initiation à la pleine conscience. Malheureusement, les enseignants ont déjà tellement à faire avec la pédagogie, l’instruction et parfois même l’éducation des élèves qu’on ne peut pas leur en demander trop ! Il y a cependant des initiatives intéressantes. Par exemple, aux Pays-Bas, les professeurs qui le souhaitent peuvent recevoir une formation à la pleine conscience pour apprendre à leurs élèves à se calmer et à se concentrer. Il n’est donc pas impossible qu’un jour, l’initiation à la pleine conscience devienne une des missions des enseignants, ou puisse du moins être proposée dans le cadre de l’école.
Enfin, Christophe André, dévoilez-nous quelques secrets de psy pour vivre avec une âme sereine?
Cela remplirait plusieurs ouvrages, surtout dans mon cas ! D’ailleurs, tous mes livres sont destinés bien sûr à mes lecteurs mais aussi à moi-même. Il me semble, pour ne pas être trop long, qu’il y a actuellement dans ma vie quatre grandes directions dont je m’efforce de ne jamais trop m’éloigner.
- La première concerne le rapport aux écrans : ne pas les laisser envahir notre existence ; ne pas commencer et finir ses journées sur l’ordinateur, ne pas répondre au téléphone si on parle à un véritable humain en face de soi (les répondeurs sont fait pour ça), ne consulter ses mails que par intervalles et pas en temps réel, fuir Twitter comme la peste...
- La deuxième, c’est le lien avec la nature : à parcourir et à contempler chaque jour ; pas une journée sans sa petite dose de verdure, de contemplation du ciel, d’un fleuve, de la mer, de la montage…
- La troisième, c’est l’apaisement émotionnel, par la pratique quotidienne d’un petit temps de méditation, de yoga, de marche méditative, ou de toute autre technique pacifiante.
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