Matthieu Ricard: « On vit dans un monde cent fois moins violent qu’il y a 500 ans »... ET s'il avait raison !?
Fils du philosophe Jean-François Revel et de la plasticienne Yahne Le Toumelin, Matthieu Ricard est un moine bouddhiste français. Né en 1946, il est l’auteur de plaidoyers pour le bonheur et pour l’altruisme ou encore d’un Art de la méditation, traduits en plus de vingt langues. En 1972, après un doctorat, il va vivre en Shechen, au Népal et verse l’intégralité de ses droits d’auteur et des bénéfices de ses conférences à l’association humanitaire, génétique cellulaire, il s’est enraciné définitivement dans la région de l’Himalaya. Il vit aujourd’hui dans le monastère de Karuna-Shechen. Nous l’avons tiré de ses méditations pour une interview, avant son rendez-vous très attendu avec le public belge aux Inattendues de Tournai, dimanche 31 août.
Pour surmonter la crise, l’humanité semble miser partout sur le dogme de la performance. Il serait, dit-on, le seul moteur de notre évolution. Qu’en pense le généticien qui sommeille en vous ?
Qu’on fait fausse route évidemment ! Il y a de la compétition dans l’évolution, ça tout le monde le sait. Cela figurait déjà clairement dans les écrits de Darwin mais, si les gens le relisaient un peu plus, ils verraient qu’il parle aussi tout le temps de coopération. En fait, il va de la coopération à la sympathie et, à un moment donné, il dit même qu’on pourrait étendre cette sympathie à l’ensemble des hôtes de cette planète et donc aux autres espèces. En gros, les derniers grands travaux de l’évolution comme ceux de Martin Nowak, montrent que l’évolution s’est toujours faite beaucoup plus par la coopération. L’humanité ne marcherait jamais sans ça, c’est évident. Les gens qui veulent être à griffes et à sang, pensant qu’ainsi le monde va mieux marcher, se trompent. C’est en réalité la meilleure façon de tout faire capoter, qu’il s’agisse d’un état ou d’une entreprise. On a montré que les endroits où il fait le meilleur travailler, c’est là où l’on se sent bien, où règne un esprit d’équipe, où les gens sont contents.
La crise ne serait donc qu’une notion relative ?
Le quart monde existe en Europe occidentale et pas mal de gens vivent chez nous dans la pauvreté. Mais venez nous voir au Népal, où les familles doivent se mettre à plusieurs autour du même fourneau pour faire des économies. Là, on voit mieux ce que c’est que la crise. J’ajoute que ce qu’on appelle la crise a été provoqué par les pays riches du Nord, qui émettent entre cent et deux cents fois plus de CO2 que les pays du Sud, qui doivent affronter des problèmes de santé à cause de nous. Ce sont les pays les plus pauvres qui souffrent le plus des changements climatiques. Donc arrêtons de pleurer.
Pensez-vous qu’on devrait réapprendre la méditation pour prendre de la distance par rapport aux problèmes de l’instant présent ?
Attention, qu’est-ce que c’est que de ne pas être dans l’instant présent ? C’est être distrait. En étant pas dans l’instant présent, on fonctionne très mal, parce qu’on est distrait. Une étude à Harvard a montré qu’en Amérique du Nord, pendant à peu près 45% du temps, les gens n’ont pas l’esprit à ce qu’ils font. Ils sont ailleurs. Et ces moments de distraction sont jugés comme procurant moins de bien-être que ceux où l’on reste focalisé sur ce qu’on est en train de faire. Etre dans le moment présent, c’est donc être présent dans ce qu’on fait. Et si l’on est présent, on est toujours dans le moment présent, même quand on pense à l’avenir.
Il faut donc être dans le moment présent pour penser à l’avenir ?
Oui, le moment présent est en fait un moment de lucidité où l’on est parfaitement conscient de ce qui se passe dans notre esprit. Par conséquent, si l’on essaie de penser à l’avenir, on pense à l’avenir. On n’est pas à ruminer avec tout ce bavardage neuronal qu’on appelle la distraction !
La méditation n’a pas toujours bonne presse en Occident, parce qu’on la relie généralement à la religion ou à certaines sectes orientales…
Il y a chez vous une chaire de pleine conscience à l’Université Libre de Bruxelles. On y délivre des diplômes. Pour donner ses lettres de noblesse à la méditation, il faut effectivement la démystifier. Le stade religieux est dépassé. Time Magazine a parlé de la révolution de la pleine conscience. La méditation, c’est un entraînement de l’esprit. On n’a pas besoin d’aller en Orient, d’appartenir à une religion ni à une secte pour savoir entraîner son esprit. On l’entraîne tout le temps mais pas forcément aux bonnes choses. Les enfants entraînent, par exemple, leur esprit aux jeux vidéo violents, ce qui augmente leur agressivité dans le moment et leur agressivité dans les années à venir. La méditation, c’est cultiver les qualités dont on a tous le potentiel comme la pleine conscience, l’amour altruiste, la compassion, la vigilance, l’équilibre émotionnel…
La société humaine actuelle donne d’elle-même une image souvent violente, insécurisante, désespérée. Vous partagez cette vision médiatique ?
Violente ? C’est faux ! On vit dans un monde cent fois moins violent qu’il y a 500 ans. C’est l’un des plus gros clichés médiatiques. Steven Pinker a écrit tout un livre clair comme de l’eau de roche sur le déclin de la violence. On n’a jamais eu dans l’histoire aussi peu de risques de se faire tuer en Europe qu’aujourd’hui ! Les violences faites aux enfants ont aussi diminué de moitié en vingt ans aux Etats-Unis. On ne fait pas assez de Une dans les journaux pour souligner que la violence diminue. On préfère parler de la facilité avec laquelle on peut acheter une Kalachnikov à Marseille. Titrez votre article sur le déclin de la violence pour que le public perçoive cette réalité surprenante !
Le Dalaï-Lama est interdit de séjour dans son propre pays. Son peuple est victime de violences physiques et morales… En tant que moine bouddhiste, cette situation vous révolte ? Vous méditez sur la question ?
On ne va pas faire la guerre de mille ans au Tibet ! Depuis douze ans, avec mon association Karuna-Shechen, on s’est engagés dans 130 projets humanitaires touchant aux domaines de la santé et des écoles. On a apporté dix millions d’euros sur place. L’humanitaire est mon occupation principale. Je travaille au Népal, au Tibet, en Inde. Il y a 25.000 enfants dans les écoles qu’on a construites avec Karuna-Shechen. Si je ne reste pas à vivre tranquille dans mon ermitage, c’est pour aider là où on peut aider. Un jour, il faudra bien se réconcilier. Il n’y a pas d’autre solution.
Fils du philosophe Jean-François Revel et de la plasticienne Yahne Le Toumelin, Matthieu Ricard est un moine bouddhiste français. Né en 1946, il est l’auteur de plaidoyers pour le bonheur et pour l’altruisme ou encore d’un Art de la méditation, traduits en plus de vingt langues. En 1972, après un doctorat, il va vivre en Shechen, au Népal et verse l’intégralité de ses droits d’auteur et des bénéfices de ses conférences à l’association humanitaire, génétique cellulaire, il s’est enraciné définitivement dans la région de l’Himalaya. Il vit aujourd’hui dans le monastère de Karuna-Shechen. Nous l’avons tiré de ses méditations pour une interview, avant son rendez-vous très attendu avec le public belge aux Inattendues de Tournai, dimanche 31 août.
Pour surmonter la crise, l’humanité semble miser partout sur le dogme de la performance. Il serait, dit-on, le seul moteur de notre évolution. Qu’en pense le généticien qui sommeille en vous ?
Qu’on fait fausse route évidemment ! Il y a de la compétition dans l’évolution, ça tout le monde le sait. Cela figurait déjà clairement dans les écrits de Darwin mais, si les gens le relisaient un peu plus, ils verraient qu’il parle aussi tout le temps de coopération. En fait, il va de la coopération à la sympathie et, à un moment donné, il dit même qu’on pourrait étendre cette sympathie à l’ensemble des hôtes de cette planète et donc aux autres espèces. En gros, les derniers grands travaux de l’évolution comme ceux de Martin Nowak, montrent que l’évolution s’est toujours faite beaucoup plus par la coopération. L’humanité ne marcherait jamais sans ça, c’est évident. Les gens qui veulent être à griffes et à sang, pensant qu’ainsi le monde va mieux marcher, se trompent. C’est en réalité la meilleure façon de tout faire capoter, qu’il s’agisse d’un état ou d’une entreprise. On a montré que les endroits où il fait le meilleur travailler, c’est là où l’on se sent bien, où règne un esprit d’équipe, où les gens sont contents.
La crise ne serait donc qu’une notion relative ?
Le quart monde existe en Europe occidentale et pas mal de gens vivent chez nous dans la pauvreté. Mais venez nous voir au Népal, où les familles doivent se mettre à plusieurs autour du même fourneau pour faire des économies. Là, on voit mieux ce que c’est que la crise. J’ajoute que ce qu’on appelle la crise a été provoqué par les pays riches du Nord, qui émettent entre cent et deux cents fois plus de CO2 que les pays du Sud, qui doivent affronter des problèmes de santé à cause de nous. Ce sont les pays les plus pauvres qui souffrent le plus des changements climatiques. Donc arrêtons de pleurer.
Pensez-vous qu’on devrait réapprendre la méditation pour prendre de la distance par rapport aux problèmes de l’instant présent ?
Attention, qu’est-ce que c’est que de ne pas être dans l’instant présent ? C’est être distrait. En étant pas dans l’instant présent, on fonctionne très mal, parce qu’on est distrait. Une étude à Harvard a montré qu’en Amérique du Nord, pendant à peu près 45% du temps, les gens n’ont pas l’esprit à ce qu’ils font. Ils sont ailleurs. Et ces moments de distraction sont jugés comme procurant moins de bien-être que ceux où l’on reste focalisé sur ce qu’on est en train de faire. Etre dans le moment présent, c’est donc être présent dans ce qu’on fait. Et si l’on est présent, on est toujours dans le moment présent, même quand on pense à l’avenir.
Il faut donc être dans le moment présent pour penser à l’avenir ?
Oui, le moment présent est en fait un moment de lucidité où l’on est parfaitement conscient de ce qui se passe dans notre esprit. Par conséquent, si l’on essaie de penser à l’avenir, on pense à l’avenir. On n’est pas à ruminer avec tout ce bavardage neuronal qu’on appelle la distraction !
La méditation n’a pas toujours bonne presse en Occident, parce qu’on la relie généralement à la religion ou à certaines sectes orientales…
Il y a chez vous une chaire de pleine conscience à l’Université Libre de Bruxelles. On y délivre des diplômes. Pour donner ses lettres de noblesse à la méditation, il faut effectivement la démystifier. Le stade religieux est dépassé. Time Magazine a parlé de la révolution de la pleine conscience. La méditation, c’est un entraînement de l’esprit. On n’a pas besoin d’aller en Orient, d’appartenir à une religion ni à une secte pour savoir entraîner son esprit. On l’entraîne tout le temps mais pas forcément aux bonnes choses. Les enfants entraînent, par exemple, leur esprit aux jeux vidéo violents, ce qui augmente leur agressivité dans le moment et leur agressivité dans les années à venir. La méditation, c’est cultiver les qualités dont on a tous le potentiel comme la pleine conscience, l’amour altruiste, la compassion, la vigilance, l’équilibre émotionnel…
La société humaine actuelle donne d’elle-même une image souvent violente, insécurisante, désespérée. Vous partagez cette vision médiatique ?
Violente ? C’est faux ! On vit dans un monde cent fois moins violent qu’il y a 500 ans. C’est l’un des plus gros clichés médiatiques. Steven Pinker a écrit tout un livre clair comme de l’eau de roche sur le déclin de la violence. On n’a jamais eu dans l’histoire aussi peu de risques de se faire tuer en Europe qu’aujourd’hui ! Les violences faites aux enfants ont aussi diminué de moitié en vingt ans aux Etats-Unis. On ne fait pas assez de Une dans les journaux pour souligner que la violence diminue. On préfère parler de la facilité avec laquelle on peut acheter une Kalachnikov à Marseille. Titrez votre article sur le déclin de la violence pour que le public perçoive cette réalité surprenante !
Le Dalaï-Lama est interdit de séjour dans son propre pays. Son peuple est victime de violences physiques et morales… En tant que moine bouddhiste, cette situation vous révolte ? Vous méditez sur la question ?
On ne va pas faire la guerre de mille ans au Tibet ! Depuis douze ans, avec mon association Karuna-Shechen, on s’est engagés dans 130 projets humanitaires touchant aux domaines de la santé et des écoles. On a apporté dix millions d’euros sur place. L’humanitaire est mon occupation principale. Je travaille au Népal, au Tibet, en Inde. Il y a 25.000 enfants dans les écoles qu’on a construites avec Karuna-Shechen. Si je ne reste pas à vivre tranquille dans mon ermitage, c’est pour aider là où on peut aider. Un jour, il faudra bien se réconcilier. Il n’y a pas d’autre solution.
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