Je souhaiterais vous raconter ici l'histoire de mon voyage au Népal qui s'est déroulé du 21 juillet au 11 août 2014 entre Kathmandu et Muktinath en espérant susciter des envies de découvertes, convaincre les plus peureux de se lancer, rappeler des souvenirs aux connaisseurs, informer les curieux...
Pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis une jeune diplômée géologue. Enfant j'ai toujours eu une façon étrangement pacifique de voir le Monde, à tel point que je n’avais pas beaucoup d'amis à l’adolescence car j'étais "trop gentille". Souvent incomprise, j'ai fini par trouver des réponses dans le bouddhisme à l'age de 21 ans et en lisant les paroles de Bouddha, je me rend compte que c'est comme-ci dans une vie antérieure quelqu'un m'avais appris certaines de ses vérités. Bref, lors de mes études j'ai eu l'occasion de m'investir un an dans une association d'aide solidaire et partir un mois en chantier au Bénin. A présent diplômée et à la recherche d'un emploi, plutôt que ne rien faire, j'ai décidé de contacter les élèves de l'école et de partir avec eux à mes frais sur le chantier à venir. Celui-ci était prévu au Népal.
J'ai pris un billet d'avion de dernière minute pour Kathmandu, ma seule condition pour partir étant de ne toujours pas avoir trouvé de travail, maxi 2 semaines avant le départ, et de trouver un prix abordable. Malheureusement, le prix n'était abordable que sur une certaine période me permettant de ne faire qu'une semaine de chantier solidaire sur 4 et 2 semaines de visite du Népal avec le groupe avant le chantier. J'ai hésité, car la visite était sous forme de trek et je ne m'en pensais pas forcément capable. J'ai pensé que c'était déjà bien de participer ne serait-ce qu'un peu au projet et que la visite du Népal, pays en partie bouddhiste serait très importante pour moi dans la mesure ou je n'avais jamais rencontré personne qui me comprenne comme un bouddhiste (vivant trop loin des monastères et temples). Je suis partie "les mains dans les poches" à l'aventure, sans visa (on peut le faire sur place) toute seule, en m'étant juste bien renseignée avant sur ce qu'il fallait faire et ne pas faire au Népal et sur les conditions du trek. Je suis une grosse phobique de la solitude, je ne voyage jamais seule, je n'ai pas beaucoup d'argent...j'avais juste du temps à donner à quelqu'un alors je l'ai fait ! Alors vous aussi vous pouvez le faire !!!
Arrivée à KTM, le groupe de 5 étudiants auquel je me joignais avait déjà atterrit et avait choisis un gite pour la nuit qu'ils devaient me communiquer par texto. Mais mon téléphone ne fonctionnait pas et je me suis retrouvée seule avec ma grosse valise au milieu de la ville sur un continent totalement inconnu pour moi, au milieu d'une foule de gens qui ne parlaient pas ma langue et ne faisaient pas attention à moi... aucun moyen de contacter les autres et la nuit qui arrivait : j'ai vraiment paniquée ! Dans l'avion j'avais commencé à lire "le bouddhisme pour les nuls", (conseillés par les membres du forum). Il y était écris que toutes nos peurs étaient irrationnelles, illusoires et que le simple fait d'observer ce qui nous entourait avec "vérité" calmait la peur. Et c'était vrai. J'allais bien, personne ne m'attaquait, les gens souriaient. J'ai emprunté un téléphone à un gentil monsieur, j'ai donné l'adresse à un touc-touc et il m'a emmené à bon port ou j'ai retrouvé le groupe ! On me l'aurait raconté avant, je ne m'en sentais pas capable ! Croyez en vous, même dans la peur.
Le lendemain nous avons pris le bus pour la chaîne des Annapurnas, pendant 7h pour se rendre à Pokhara, puis un taxi pour Nayapul afin de commencer le trek en compagnie de notre guide Tulsi. Le premier jour était comme une renaissance. Le climat (chaud et humide), les visages (très beaux, mates aux yeux marrons ou oranges, légèrement bridés, des cheveux très foncés), la langue (le népali), les vêtements traditionnels de certaines femmes, la musique hindi, népali et les us et coutumes (cracher par terre, les divinités et temples hindous, les bus colorés...) tout était différents pour nous et nouveaux. Je me sentais comme un bébé, émerveillée devant tout, à vouloir tout comprendre, tout apprendre. Je ressentais chaque seconde comme précieuse et éphémère, chaque vision comme une image authentique à contrario des pixels de la TV quand on regarde un documentaire. Je me suis alors dit que chaque jour dans notre vie, de retour en France, si nous pouvions avoir ce regard neuf, cet émerveillement d'enfant pour tous ce que nous faisons et voyons avec habitude chaque jour comme nos arbres, nos champs de blés, notre brouillard ou nos maisons, la vie serait infiniment plus intense.
Je ne m'attendais pas à ce que les paysages soient si verts dans la vallée. La végétation était grandiose : les bambous beaucoup gros et les rhododendrons 15x plus haut que chez nous occidentaux. Nous avons fait 2000m de dénivelé en 2 jours, un effort auquel je m'étais préparé mais qui m'a tout de même surpris. J'ai beaucoup conversé avec Tulsi qui est bouddhiste et c'était la première fois que je pouvais en parler avec quelqu'un physiquement. Nous avons récité des mantras ensemble en marchant et une fille du groupe (nous l'appellerons Marion) m'a pausé plein de questions à propos de moi et de mon livre, car elle s’intéressait également au bouddhisme. Je ne détaillerais pas la multitudes de paysages, cascades et passerelles splendides que nous avons franchies mais si vous êtes quelqu'un qui aime les défis et souhaite surmonter sa peur du vide (en ayant la sensation de pouvoir y arriver tout de même), tester son effort (bonne santé exigée), se retrouver, ou encore tester la vie avec un confort sommaire pendant quelques jours,les Annapurnas sont un endroit grandiose pour cela ! Arrivés à Tatopani, nous avons encore pris le bus, encore plusieurs heures, mais cette fois le bus de montagne, déconseillé par les livres-guides vendus en occidents... Pourquoi? Parce que ces bus, sont entretenus très sommairement (quoi que très solides) et parce que les routes de montagnes ne sont pas vraiment des routes mais des pistes dans la roches dures et glissantes ou meuble et boueuse, à flan de falaise (le gouffre le plus profond du Monde il parait) et que les suspensions sont si efficaces que celui qui est assis à la fenêtre coté gouffre (moi entre autre) à l'impression à chaque secousse que le bus va tomber dans le vide. Néanmoins, des centaines de civils népalais prennent ces bus chaque jours par nécessité et les accidents ne sont pas plus courants que les nôtres en occident, (quoi que le moindre accident dans l’Himalaya est terriblement mortel). Mais nous ne méritons pas plus que ces gens d'être plus en sécurité en prenant un autre moyen de transport parce que nous avons plus d'argent. Nous avons décidé de les prendre, comme n'importe quel être humain. Tout s'est très bien passé mais j'avoue que je n'étais pas tranquille la première heure !
Après ce trajet mouvementé, nous sommes arrivés dans la région du Mustang, très différente de la vallée. Une région désertique ou les cascades verdoyantes ont laissés place aux falaises abruptes de grès, la géologie pure, le vent et le soleil de plomb. Les villages sont majoritairement bouddhistes et quelques tibétains viennent travailler dans les villages étapes des treks pour vendre des objets (écharpes en poils de yack, bracelets, porte-encens, moulins à prières...). C'est là, à Marpha, que Tulsi nous a emmené visiter notre premier monastère. Pour la première fois de ma vie, et idem pour les 5 autres personnes, nous avons tournés des moulins à prières en montant les marches d'un monastère, nous sommes entrés dans une salle de méditation, invités par un moine bouddhiste et celui-ci nous à montré les fresques qui ornaient ces lieux à l'aide de deux jeunes enfants moines. Moi qui n'étais pas très attiré par l'art sacré, j'ai vu tout ceci d'un tout nouvel œil. Regarder des images sur un écran d'ordinateur, dans un pays ou l'argent et le pouvoir sont les mots les plus importants avec aucune notion est une chose complètement décalée par rapport à être dans un endroit sacré, dans un village où cette culture est présente dès la naissance, comme une évidence, le tout expliqué par un moine. J'étais émerveillée et très émue, mais j'essayais de ne pas le montrer, de peur qu'il ne comprenne pas pourquoi je "pleurais". Tulsi lui expliqua que j'étais bouddhiste, ou du moins, que j'essayais de l'être. Le moine me demanda alors qui était mon maître, mais lorsque je répondis que je n'en avais pas car les rares temples étaient trop loin de mon domicile et que personne dans mon entourage ne pouvais m'enseigner le Dharma il eu l'air très étonné. Il me dit alors gentiment que s'il avait pu, il serait bien venu en France me l'enseigner. Cette rencontre restera à jamais gravée dans mon cœur. Ce qui me fis également très plaisir c'est que Marion me posait pas mal de question sur les fresques, les différents personnages et j'essayais tant bien que mal de lui expliquer grâce à ce que je lisais dans mon livre. Nous avions également beaucoup de conseils mutuels à nous donnez, sur nos expériences vécus et nous commencions à lier une amitié.
La suite de notre voyage, aussi fatiguant physiquement qu'il puisse être, a été un épanouissement personnel et une découverte du bouddhisme, de la culture népalaise et de l'Himalaya, inestimable à mes yeux. La lecture simultanée de mon livre me plongeait au cœur des idées qui m'entourait et cela a définitivement confirmée l'idée que cette façon de pensée était faite pour moi. Lorsque le temps fut venu pour nous de retourner à Kathmandu, ma vision de ce pays que je regardais auparavant sur une carte n'était plus du tout la même. Ce pays avait un sens, une identité que je comprenais enfin. Les adieux avec Tulsi ont été forts en émotions mais les larmes reflétaient l'immense bonheur que nous avions de le connaître
De retour sur Kathmandu, la pollution et la pauvreté de certaines personnes nous ont ramenés à la réalité. Le Népal est un des 5 pays les plus pauvres du Monde. Les gens ne sont pas aussi souriants qu'à la montagne ou le travail ne manque pas, mais malgré tout, la majorité des sans-emplois essaient de rendre un service contre de l'argent au lieu de mendier, ce qui montre une volonté de gagner quelque chose par le fruit de ses efforts. En tant que touristes, nous ne pouvons pas faire grand choses pour eux, si ce n'est que d'avoir de la bonne compassion, de reconnaitre leur souffrance et de faire ce que l'on peut pour les aider. Le plus dure est de ne rien donner aux mendiants, même les femmes avec des bébés car d'après Tulsi cela ne les aide pas mais les incites à mendier avec leurs enfants dans la rue. Aider ici consisterait à acheter des produits pour faire vivre les honnêtes commerçant, faire des dons à des associations qui eux savent comment répartir les dons ou encore à les faire sortir de la rue. Et c'est la que notre projet de solidarité intervient.
Le projet de solidarité auquel j'ai participé consiste à aider une association qui aide les enfants des rues à s'en sortir. Ces enfants sont récupérés dans la rue par une maraudeuse, souvent drogués, mutilés et livrés à eux mêmes. Basées à Kathmandu, les deux structures du centre accueillent des enfants de tout petit (5 ans) à adolescent, s'occupent d'eux, leur donnent des cours, un foyer et de la nourriture et les réintègre dans la vie et à l'école. L'association fait également de la sensibilisation sur les dangers de la rue et de la drogue dans les écoles, pour éviter que de nouveaux enfants se "perdent". La réalité est très dure, mais il ne faut pas, du moins essayer de ne pas se laisser surcharger par les émotions car ces enfants ont avant tout besoin d'aide et non de larmes. L'équipe fait un travail formidable pour cela. Moi qui ne savait pas encore à quelle association donner lorsque j'aurais un travail, je me sens à présent concernée par ce projet et je sais vers qui je me tournerais à présent. D'autant plus que j'ai toujours pensé que les droits des enfants était primordiaux pour avoir une chance de maîtriser leur avenir. L'idée du groupe d'étudiants était de venir réaménager le toit du centre en jardin-potager pour permettre une certaine autosuffisance du centre en nourriture. Le tout en établissant un outils pédagogique pour les enfants en leur apprenant à semer, cultiver et récolter chaque plante. Le temps que j'ai passé m'a permis de les aider à acheter, et acheminer le matériel sur le toit (bac, terres, granulats, briques...) à faire des plans (allées, couloirs), prévoir les associations de plantes, commencer à remplir les bacs et construire une pépinière. Après mon départ, le reste de l'équipe avec l'aide des enfants a pu terminer le potager-jardin et former les enfants et le personnel à l'entretient du jardin et des plantes.
Le plus émouvant lors de mon départ n'a pas été la tristesse de partir mais le bonheur ressentit d'avoir vécu cette aventure et la réalisation que c'est entièrement par ma volonté, mon audace de partir "à la dernière minute" et mon courage (je flippais de partir seule et d'y retrouver des inconnus) que je me suis retrouvée là-bas à faire ce que j'y ai fait. Le retour en France a été un choc mais je savais déjà à quoi m'attendre, ayant déjà été 2 fois en Afrique, la principale réaction étant de se dire qu'on a beaucoup (trop ?) de confort en Occident, que la plupart des gens à Paris font la gueule, que le fait d'avoir tout les produits que nous voulons provoque un insupportable gâchis et que (enfin personnellement) je n'ai pas besoin de toutes ces choses superflues en quantité démentielles qui sont proposées dans nos magasins pour être heureuse. Malgré tout nous avons un système de santé remarquable mais des gens ne savent pas la chance qu'ils ont et ne l'apprécie pas à sa juste valeur. Après tous cela, le plus dure a été pour moi de réaliser qu'il n'y avait plus (ou je ne les vois pas) de bouddhistes autour de moi (du moins, près de moi) mais cela n'a fait que renforcer mon désir de finir mon livre, de me mettre une bonne fois pour toute à la pratique régulière et assidue de la méditation, de me donner à 200% de plus pour trouver un travail afin de pouvoir m'installer définitivement quelque part et enfin pouvoir "prendre refuge" et parrainer un ou plusieurs enfants. Et bien sûre, plus je vis des expériences comme celle-ci plus j'ai envie d'en revivre et de transmettre cette envie à mon entourage pour que eux aussi puisse ouvrir leur cœur aux nécessiteux, ouvrir leur esprit au Monde et aux différentes cultures, aux Hommes.
Je n'ai pas donné énormément de détails comparé à tous ce que j'ai vécu, néanmoins, cela fait déjà un beau pavé donc je vous remercie de m'avoir lu jusqu'ici, en espérant vous avoir fait voyager, plaisir ou rêver ! N’hésitez pas à me demander plus de précision sur certains aspects.
Daniabaâd et soyez en paix
Dernière édition par Bodhi le Ven 19 Sep 2014, 19:37, édité 1 fois
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