AmourAmour[/
« Le seul organe de contact avec l’existence est l’acceptation, l’amour » (PG5, 76)
« Parmi les êtres humains, on ne reconnaît pleinement l’existence que de ceux qu’on aime. » (PG5, 76)
Seul l’amour approche de la réalité:
« L’esprit n’est forcé de croire à l’existence de rien (subjectivisme, idéalisme absolu, solipsisme, scepticisme : voir les Upanishads, les Taoïstes et Platon, qui, tous, usent de cette attitude philosophique à titre de purification). C’est pourquoi le seul organe de contact avec l’existence est l’acceptation, l’amour. C’est pourquoi beauté et réalité sont identiques. C’est pourquoi la joie et le sentiment de réalité sont identiques. » (PG5, 76)
« Se vider de sa fausse divinité, se nier soi-même, renoncer à être en
imagination le centre du monde, discerner tous les points du monde comme étant des centres au même titre et le véritable centre comme étant hors du monde, c’est consentir au règne de la nécessité mécanique dans la matière et du libre choix au centre de chaque âme. Ce consentement est amour. La face de cet amour tournée vers les personnes pensantes est charité du prochain ; la face tournée vers la matière est amour de l’ordre du monde, ou, ce qui est la même chose, amour de la beauté du monde. » (AD5, 148-149)
« Ce qui permet de contempler la nécessité et de l’aimer, c’est la beauté du monde. Sans la beauté ce ne serait pas possible. » (IPC, 157)
« Dans la beauté du monde la nécessité brute devient objet d’amour. Rien n’est beau comme la pesanteur dans les plis fugitifs des ondulations de la mer ou les plis presque éternels des montagnes. La mer n’est pas moins belle à nos yeux parce que parfois des bateaux sombrent. Elle en est plus belle au contraire. Si elle modifiait le mouvement de ses vagues pour épargner un bateau, elle serait un être doué de discernement et de choix, non pas ce fluide parfaitement obéissant à toutes les pressions extérieures. C’est cette parfaite obéissance qui est sa beauté. » (AD5, 112)
« L’art est une tentative pour transporter dans une quantité finie de matière modelée par l’homme une image de la beauté infinie de l’univers entier. Si la tentative est réussie, cette portion de matière ne doit pas cacher l’univers, mais au contraire en révéler la réalité tout autour. » (AD5, 159)
L’esprit de vérité dans l’amour:
« Amour de la vérité est une expression impropre. La vérité n’est pas un objet d’amour. Elle n’est pas un objet. Ce qu’on aime, c’est quelque chose qui existe, que l’on pense, et qui par là peut être occasion de vérité ou d’erreur. Une vérité est toujours la vérité de quelque chose. La vérité est l’éclat de la réalité. L’objet d’amour n’est pas la vérité, mais la réalité. Désirer la vérité, c’est désirer un contact avec une réalité, c’est l’aimer. On ne désire la vérité que pour aimer dans la vérité. On désire connaître la vérité de ce qu’on aime. Au lieu de parler d’amour de la vérité, il vaut mieux parler d’un esprit de vérité dans l’amour.
L’amour réel et pur désire toujours avant tout demeurer tout entier dans la
vérité, quelle qu’elle puisse être, inconditionnellement.Toute autre espère
d’amour désire avant tout des satisfactions, et de ce fait est principe d’erreur et de mensonge. L’amour réel et pur est par lui-même esprit de vérité. C’est le Saint-Esprit. Le mot grec qu’on traduit par esprit signifie littéralement
souffle igné, souffle mélangé à du feu, et il désignait, dans l’antiquité, la
notion que la science désigne aujourd’hui par le mot d’énergie. Ce que nous
traduisons ‘esprit de vérité’ signifie l’énergie de la vérité, la vérité comme
force agissante. L’amour pur est cette force agissante, l’amour qui ne veut à aucun prix, en aucun cas, ni du mensonge ni de l’erreur. » (E2, 319-320).
« L’amour a besoin de réalité. Aimer à travers une apparence corporelle un être imaginaire, quoi de plus atroce le jour où on s’en aperçoit ? Bien plus atroce que la mort, car la mort n’empêche pas l’aimé d’avoir été. C’est la punition du crime d’avoir nourri l’amour avec de l’imagination. » (PG5,77)
La connaissance de ce qu’on aime:
« Un enfant apprend une leçon de géographie pour avoir une bonne note, ou par obéissance aux ordre reçus, ou pour faire plaisir à ses parents, ou parce qu’il sent une poésie dans les pays lointains et dans leurs noms. Si aucun de ces mobiles n’existe, il n’apprend pas sa leçon.
Si à un certain moment il ignore quelle est la capitale du Brésil, et si au
moment suivant il l’apprend, il a une connaissance de plus. Mais il n’est
aucunement plus proche de la vérité qu’auparavant. L’acquisition d’une
connaissance fait dans certains cas approcher de la vérité, mais dans d’autres cas n’en approche pas. Comment discerner les cas ?
Si un homme surprend la femme qu’il aime et à qui il avait donné toute sa
confiance en flagrant délit d’infidélité, il entre en contact brutal avec de la
vérité. S’il apprend qu’une femme qu’il ne connaît pas, dont il entend pour la première fois le nom, dans une ville qu’il ne connaît pas davantage, a trompé son mari, cela ne change aucunement sa relation avec la vérité.
Cet exemple fournit la clef. L’acquisition des connaissances fait approcher de la vérité quand il s’agit de la connaissance de ce qu’on aime, et en aucun autre cas. » (E2, 317-318).
« D’une manière générale, toute instruction (...) devrait avoir pour objet
essentiel d’augmenter la sensibilité à la beauté du monde (...). » (E2, 115)
L’art de transposer les vérités:
« Le second obstacle à la culture ouvrière est qu’à la condition ouvrière, comme à toute autre, correspond une disposition particulière de la sensibilité. Par suite, il y a quelque chose d’étranger dans ce qui a été élaboré par d’autres et pour d’autres.Le remède à cela, c’est un effort de traduction. Non pas de vulgarisation mais de traduction, ce qui est bien différent.
Non pas prendre les vérités, déjà bien trop pauvres, contenues dans la culture des intellectuels, pour les dégrader, les mutiler, les vider de leur saveur ; mais simplement les exprimer, dans leur plénitude, au moyen d’un langage qui, selon le mot de Pascal, les rende sensibles au coeur, pour des gens dont la sensibilité se trouve modelée par la condition ouvrière. » (E2, 91)
« L’art de transposer les vérités est un des plus essentiels et des moins
connus. Ce qui le rend difficile, c’est que pour le pratiquer; il faut s’être
placé au centre d’une vérité, l’avoir possédée dans sa nudité, derrière la forme particulière sous laquelle elle se trouve par hasard exposée.
Au reste la transposition est un critérium pour une vérité. Ce qui ne peut pas être transposé n’est pas une vérité ; de même que ce qui ne change pas d’apparence selon le point de vue n’est pas un objet solide, mais un trompe-l’oeil (...). » (E2, 91-92)
« La science doit être présentée aux paysans et aux ouvriers de manières très différentes. Pour les ouvriers, il est naturel que tout soit dominé par la mécanique. Pour les paysans, tout devrait avoir pour centre le merveilleux
circuit par lequel l’énergie solaire, descendue dans les plantes, fixée par la
chlorophylle, concentrée dans les graines et les fruits, entre dans l’homme qui mange ou boit, passe dans ses muscles et se dépense pour l’aménagement de la terre. Tout ce qui se rapporte à la science peut être disposé autour de ce circuit, car la notion d’énergie est au centre de tout. La pensée de ce circuit, si elle pénétrait dans l’esprit des paysans, envelopperait le travail de poésie. D’une manière générale, toute instruction, dans les villages, devrait avoir pour objet essentiel d’augmenter la sensibilité à la beauté du monde, à la beauté de la nature. (...)
Bien entendu, augmenter la sensibilité à la beauté ne s’accomplit pas en disant : “ Regardez comme c’est beau ! ” C’est moins facile. » (E2, 114-115)
« Il y aurait une manière simple d’introduire la nécessité géométrique dans une école professionnelle, en associant l’étude et l’atelier. On dirait aux enfants : “ Voici un certain nombre de tâches à exécuter (fabriquer des objets satisfaisant à telle, telles et telles conditions). Les unes sont possibles, les autres, impossibles. Exécutez celles qui sont possibles, et celles que vous n’exécutez pas, forcez-moi à admettre qu’elles sont impossibles. ” Par cette feinte, toute la géométrie peut s’introduire dans le travail. L’exécution est une preuve empirique suffisante de la possibilité, mais pour l’impossibilité il n’y a pas de preuve empirique ; il faut une démonstration. L’impossibilité est la forme concrète de la nécessité.
Quant au reste de la science, tout ce qui appartient à la science classique
(...) procède principalement d’une méthode analogique, consistant à transporter dans la nature les relations qui dominent le travail humain. » (E2, 94)
Jean Claude (pour la retranscription)
« Le seul organe de contact avec l’existence est l’acceptation, l’amour » (PG5, 76)
« Parmi les êtres humains, on ne reconnaît pleinement l’existence que de ceux qu’on aime. » (PG5, 76)
Seul l’amour approche de la réalité:
« L’esprit n’est forcé de croire à l’existence de rien (subjectivisme, idéalisme absolu, solipsisme, scepticisme : voir les Upanishads, les Taoïstes et Platon, qui, tous, usent de cette attitude philosophique à titre de purification). C’est pourquoi le seul organe de contact avec l’existence est l’acceptation, l’amour. C’est pourquoi beauté et réalité sont identiques. C’est pourquoi la joie et le sentiment de réalité sont identiques. » (PG5, 76)
« Se vider de sa fausse divinité, se nier soi-même, renoncer à être en
imagination le centre du monde, discerner tous les points du monde comme étant des centres au même titre et le véritable centre comme étant hors du monde, c’est consentir au règne de la nécessité mécanique dans la matière et du libre choix au centre de chaque âme. Ce consentement est amour. La face de cet amour tournée vers les personnes pensantes est charité du prochain ; la face tournée vers la matière est amour de l’ordre du monde, ou, ce qui est la même chose, amour de la beauté du monde. » (AD5, 148-149)
« Ce qui permet de contempler la nécessité et de l’aimer, c’est la beauté du monde. Sans la beauté ce ne serait pas possible. » (IPC, 157)
« Dans la beauté du monde la nécessité brute devient objet d’amour. Rien n’est beau comme la pesanteur dans les plis fugitifs des ondulations de la mer ou les plis presque éternels des montagnes. La mer n’est pas moins belle à nos yeux parce que parfois des bateaux sombrent. Elle en est plus belle au contraire. Si elle modifiait le mouvement de ses vagues pour épargner un bateau, elle serait un être doué de discernement et de choix, non pas ce fluide parfaitement obéissant à toutes les pressions extérieures. C’est cette parfaite obéissance qui est sa beauté. » (AD5, 112)
« L’art est une tentative pour transporter dans une quantité finie de matière modelée par l’homme une image de la beauté infinie de l’univers entier. Si la tentative est réussie, cette portion de matière ne doit pas cacher l’univers, mais au contraire en révéler la réalité tout autour. » (AD5, 159)
L’esprit de vérité dans l’amour:
« Amour de la vérité est une expression impropre. La vérité n’est pas un objet d’amour. Elle n’est pas un objet. Ce qu’on aime, c’est quelque chose qui existe, que l’on pense, et qui par là peut être occasion de vérité ou d’erreur. Une vérité est toujours la vérité de quelque chose. La vérité est l’éclat de la réalité. L’objet d’amour n’est pas la vérité, mais la réalité. Désirer la vérité, c’est désirer un contact avec une réalité, c’est l’aimer. On ne désire la vérité que pour aimer dans la vérité. On désire connaître la vérité de ce qu’on aime. Au lieu de parler d’amour de la vérité, il vaut mieux parler d’un esprit de vérité dans l’amour.
L’amour réel et pur désire toujours avant tout demeurer tout entier dans la
vérité, quelle qu’elle puisse être, inconditionnellement.Toute autre espère
d’amour désire avant tout des satisfactions, et de ce fait est principe d’erreur et de mensonge. L’amour réel et pur est par lui-même esprit de vérité. C’est le Saint-Esprit. Le mot grec qu’on traduit par esprit signifie littéralement
souffle igné, souffle mélangé à du feu, et il désignait, dans l’antiquité, la
notion que la science désigne aujourd’hui par le mot d’énergie. Ce que nous
traduisons ‘esprit de vérité’ signifie l’énergie de la vérité, la vérité comme
force agissante. L’amour pur est cette force agissante, l’amour qui ne veut à aucun prix, en aucun cas, ni du mensonge ni de l’erreur. » (E2, 319-320).
« L’amour a besoin de réalité. Aimer à travers une apparence corporelle un être imaginaire, quoi de plus atroce le jour où on s’en aperçoit ? Bien plus atroce que la mort, car la mort n’empêche pas l’aimé d’avoir été. C’est la punition du crime d’avoir nourri l’amour avec de l’imagination. » (PG5,77)
La connaissance de ce qu’on aime:
« Un enfant apprend une leçon de géographie pour avoir une bonne note, ou par obéissance aux ordre reçus, ou pour faire plaisir à ses parents, ou parce qu’il sent une poésie dans les pays lointains et dans leurs noms. Si aucun de ces mobiles n’existe, il n’apprend pas sa leçon.
Si à un certain moment il ignore quelle est la capitale du Brésil, et si au
moment suivant il l’apprend, il a une connaissance de plus. Mais il n’est
aucunement plus proche de la vérité qu’auparavant. L’acquisition d’une
connaissance fait dans certains cas approcher de la vérité, mais dans d’autres cas n’en approche pas. Comment discerner les cas ?
Si un homme surprend la femme qu’il aime et à qui il avait donné toute sa
confiance en flagrant délit d’infidélité, il entre en contact brutal avec de la
vérité. S’il apprend qu’une femme qu’il ne connaît pas, dont il entend pour la première fois le nom, dans une ville qu’il ne connaît pas davantage, a trompé son mari, cela ne change aucunement sa relation avec la vérité.
Cet exemple fournit la clef. L’acquisition des connaissances fait approcher de la vérité quand il s’agit de la connaissance de ce qu’on aime, et en aucun autre cas. » (E2, 317-318).
« D’une manière générale, toute instruction (...) devrait avoir pour objet
essentiel d’augmenter la sensibilité à la beauté du monde (...). » (E2, 115)
L’art de transposer les vérités:
« Le second obstacle à la culture ouvrière est qu’à la condition ouvrière, comme à toute autre, correspond une disposition particulière de la sensibilité. Par suite, il y a quelque chose d’étranger dans ce qui a été élaboré par d’autres et pour d’autres.Le remède à cela, c’est un effort de traduction. Non pas de vulgarisation mais de traduction, ce qui est bien différent.
Non pas prendre les vérités, déjà bien trop pauvres, contenues dans la culture des intellectuels, pour les dégrader, les mutiler, les vider de leur saveur ; mais simplement les exprimer, dans leur plénitude, au moyen d’un langage qui, selon le mot de Pascal, les rende sensibles au coeur, pour des gens dont la sensibilité se trouve modelée par la condition ouvrière. » (E2, 91)
« L’art de transposer les vérités est un des plus essentiels et des moins
connus. Ce qui le rend difficile, c’est que pour le pratiquer; il faut s’être
placé au centre d’une vérité, l’avoir possédée dans sa nudité, derrière la forme particulière sous laquelle elle se trouve par hasard exposée.
Au reste la transposition est un critérium pour une vérité. Ce qui ne peut pas être transposé n’est pas une vérité ; de même que ce qui ne change pas d’apparence selon le point de vue n’est pas un objet solide, mais un trompe-l’oeil (...). » (E2, 91-92)
« La science doit être présentée aux paysans et aux ouvriers de manières très différentes. Pour les ouvriers, il est naturel que tout soit dominé par la mécanique. Pour les paysans, tout devrait avoir pour centre le merveilleux
circuit par lequel l’énergie solaire, descendue dans les plantes, fixée par la
chlorophylle, concentrée dans les graines et les fruits, entre dans l’homme qui mange ou boit, passe dans ses muscles et se dépense pour l’aménagement de la terre. Tout ce qui se rapporte à la science peut être disposé autour de ce circuit, car la notion d’énergie est au centre de tout. La pensée de ce circuit, si elle pénétrait dans l’esprit des paysans, envelopperait le travail de poésie. D’une manière générale, toute instruction, dans les villages, devrait avoir pour objet essentiel d’augmenter la sensibilité à la beauté du monde, à la beauté de la nature. (...)
Bien entendu, augmenter la sensibilité à la beauté ne s’accomplit pas en disant : “ Regardez comme c’est beau ! ” C’est moins facile. » (E2, 114-115)
« Il y aurait une manière simple d’introduire la nécessité géométrique dans une école professionnelle, en associant l’étude et l’atelier. On dirait aux enfants : “ Voici un certain nombre de tâches à exécuter (fabriquer des objets satisfaisant à telle, telles et telles conditions). Les unes sont possibles, les autres, impossibles. Exécutez celles qui sont possibles, et celles que vous n’exécutez pas, forcez-moi à admettre qu’elles sont impossibles. ” Par cette feinte, toute la géométrie peut s’introduire dans le travail. L’exécution est une preuve empirique suffisante de la possibilité, mais pour l’impossibilité il n’y a pas de preuve empirique ; il faut une démonstration. L’impossibilité est la forme concrète de la nécessité.
Quant au reste de la science, tout ce qui appartient à la science classique
(...) procède principalement d’une méthode analogique, consistant à transporter dans la nature les relations qui dominent le travail humain. » (E2, 94)
Jean Claude (pour la retranscription)
Dernière édition par le Ven 14 Sep 2007, 10:02, édité 3 fois
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