Notre système économique et financier, consumériste, avec cette coupure entre nature et culture, humain et non-humain, avec cette autosuffisance et auto-arrogance de
l’humain qui se pose comme maître, dominateur de la nature, nous a
amenés à la frontière du suicide.
Ce n'est pas moi qui le dit mais le Lama Denys Teundroup, du centre bouddhiste Karmaling lors de la rencontre inter-religieuse « Ecologie et Spiritualité- Comment réanchanter le monde » ,
qui a eu lieu les 2,3 et 4 oct 2004, à l'écosite sacré du val St Hugon (domaine d’Avalon) en Savoie
http://www.rimay.net/spip.php ?article403
l’humain qui se pose comme maître, dominateur de la nature, nous a
amenés à la frontière du suicide.
Ce n'est pas moi qui le dit mais le Lama Denys Teundroup, du centre bouddhiste Karmaling lors de la rencontre inter-religieuse « Ecologie et Spiritualité- Comment réanchanter le monde » ,
qui a eu lieu les 2,3 et 4 oct 2004, à l'écosite sacré du val St Hugon (domaine d’Avalon) en Savoie
http://www.rimay.net/spip.php ?article403
Nous vivons aujourd’hui - et beaucoup le disent, de
différentes façons - dans une société léthale, une société de mort, une
société qui n’est pas vivable et qui n’est pas viable.
Certains parlent de “développement durable”, ce qui
déjà suppose - et c’est bien établi - que le mode de développement
actuel n’est pas durable.
Mais peut-être est-il encore plus juste de parler de
viabilité, d’une société viable. Globalement, le modèle social
occidental moderne n’est pas viable.
Sa coupure d’avec la nature - qui a amené une scission
entre l’habitant et l’habitacle, entre l’humain et le non-humain, le
plus qu’humain - a créé une dysharmonie qui déséquilibre, pollue,
corrompt et nous amène dans une situation de dysfonctionnement, une
dégradation sur le point de devenir irréversible.
Dans une vision traditionnelle, il y a une certaine
intelligence de la dégradation ou de la dégénérescence, alors qu’en
Occident nous avons l’habitude d’une vision de progrès.
Qu’est-ce que le progrès ? Je ne suis pas sûr de la
réponse. Il semble que nous ayons identifié cette notion à une capacité
grandissante d’abstraction qui a permis le développement des
techno-sciences et un pouvoir d’action, une force, une puissance, qui
est à la base de notre civilisation moderne et de notre culture
occidentale. Le progrès, dans cette abstraction, s’est développé comme
une aptitude du mental à concevoir des idées, des concepts de plus en
plus élaborés, à développer une représentation du monde basée
essentiellement sur une approche quantitative : nous vivons dans une
sorte de règne de la quantité et aussi de la vitesse.
Nous sommes passés d’un esclavagisme physique à un esclavagisme économique
Est-ce que le monde a progressé qualitativement au fil
des derniers siècles ? La question mérite d’être posée, et la réponse,
pour le moins, n’est pas évidente du tout.
Sommes-nous finalement aujourd’hui plus “civilisés”
qu’il y a quelques siècles, si tant est que cette notion de
civilisation ait véritablement un sens profond ? Sommes-nous même plus
civilisés que ceux que l’on nomme avec condescendance “les sauvages” ?
Les guerres et les génocides modernes sont-ils plus civilisés que
l’étaient les combats tribaux anciens ? Il y aurait bien des questions
à poser... Finalement, je crois qu’il est nécessaire de reconsidérer
profondément toute notre vision de la civilisation.
On ne se rend pas assez compte des conséquences engendrées par l’activité globale de notre “civilisation”
européenne, blanche. Sans rentrer en détail dans l’histoire de la
colonisation et de la convergence d’un monothéisme religieux et d’un
monopolisme idéologique et économique, on peut souligner que cette
attitude “monoïque” - néologisme pour exprimer ensemble monothéisme et
monopolisme -, qui est finalement la déclinaison de l’ego dans les
domaines spirituel et matériel, a accompli une forme de génocide
mondial.
Pensez à l’histoire de l’Amérique du Sud et aux
conquistadors, à l’histoire de l’Amérique du Nord et à ses
conquérants ; pensez à l’Afrique, à l’Asie et à l’Australie. Nous sommes passés d’un esclavagisme physique à un esclavagisme économique.
Après ce constat, on peut bien sûr discuter pour savoir si
l’esclavagisme économique est plus “soft” que l’esclavagisme physique...
Certes, il n’y a pas que des aspects négatifs. Mais
aujourd’hui, à l’époque du “village planétaire”, de la mondialisation,
je crois qu’une certaine reconsidération de l’histoire est importante
pour la “guérison de l’histoire”. Si vous discutez avec des personnes
qui sont d’une autre culture et d’une autre tradition, vous comprenez
alors l’importance de remettre en question une certaine superbe
autosuffisance dans laquelle nous avons habituellement été éduqués.
On pourrait se dire que de toute façon, il y a toujours
eu des luttes, et que c’est le plus adapté qui survit. Mais cette
civilisation occidentale, cette culture qui est la nôtre, nous a amenés
aujourd’hui au bord du gouffre.
Notre système économique et
financier, consumériste, avec cette coupure entre nature et culture,
humain et non-humain, avec cette autosuffisance et auto-arrogance de
l’humain qui se pose comme maître, dominateur de la nature, nous a
amenés à la frontière du suicide.
Ce n’est pas un discours millénariste ou apocalyptique,
ce sont des données scientifiques, des notions d’écologie qui sont
aujourd’hui très largement reconnues par les meilleurs spécialistes.
Donc, à terme, notre mode de vie et notre modèle économique, tout
simplement, ne sont pas vivables.
Dans ce sens, nous sommes
effectivement dans une culture, une civilisation et une économie
léthales, c’est-à-dire de mort. Le ciel est blessé : la couche d’ozone
- la terre est blessée, les eaux sont blessées ! Nous sommes dans une
situation en laquelle le décalage entre les riches et les pauvres ne
cesse d’augmenter, alors qu’on prétend se développer et accroître les
richesses, mais cela n’est vrai qu’en calculant d’une certaine façon.
Développer une nouvelle forme de relation à la nature
Si l’on considère bien tout cela, on débouche sur une remise en
question de ce mode de fonctionnement et des valeurs qui le fondent,
une remise en question de notre relation à l’environnement, de notre
relation à la nature. Nous ne sommes pas les maîtres de la nature, nous
sommes un élément de la nature. Ce n’est pas la nature qui nous
appartient, c’est nous qui lui appartenons.
En adoptant la perspective scientifique, entre le big
bang et aujourd’hui, il apparaît clairement que nous, primates et
humains, nous ne sommes arrivés qu’aux derniers instants du monde. De
ce point de vue, nous sommes un épiphénomène tardif et un élément
contingent de la biomasse globale ; mais en même temps, et avec des
motivations purement égotiques, nous avons développé cette puissance
qui nous donne la possibilité de perturber l’équilibre naturel, de
changer même les structures de la vie avec des manipulations génétiques.
Comme beaucoup de personnes le disent aujourd’hui,
notre survie dépend finalement de notre capacité à développer une
nouvelle forme de relation à la nature, de retrouver une relation
affective, sensorielle, vivante, avec la nature. Il s’agit là d’un mode
de vie où le couplage habitant/habitacle est harmonieux. L’harmonie et
l’équilibre entre l’humain et la biosphère sont des conditions tout à
fait fondamentales dans la vision d’une société saine et d’une société
d’éveil. Là est la base d’une culture viable, d’une culture de vie et
aussi de survie.
Lama Denys Teundroup
Source : Revue Dharma, “Écologie et spiritualité”, no 49, Institut Karma Ling, octobre 2004.
des extraits des conférences en vidéo
Voir en ligne : SHANGA RIMAY INTERNATIONAL
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