La Protection de l’Environnement
Par Sa Sainteté le 17ème Karmapa
Conseils du 17ème Karmapa sur la Protection de l’Environnement
(A l’occasion du 25ème Kagyu Monlam à Bodhgaya, Décembre 2007) Protégeons l’environnement
Depuis le début de la race humaine, nous avons exploité la terre au maximum. 99 % des ressources de notre monde viennent de la nature et nous sommes en train d’user notre terre. Cette terre nous a donné des bienfaits sans mesure, mais qu’avons nous fait pour elle ? Nous lui demandons toujours quelque chose mais nous n’avons jamais rien à lui offrir en retour. Nous n’avons ni pensées bienveillantes ni amour envers elle. Dès qu’un arbre ou une plante sort de la terre, nous les coupons. La moindre parcelle de terre est l’objet de querelles. Jusqu’a présent, nous sommes engagés dans un cycle incessant de guerres et de disputes à son égard sans vraiment avoir rien fait pour elle. Désormais, la terre se renfrogne et nous abandonne. Sa Sainteté présentant le logo du Kagyu Mönlam
Sa Sainteté présentant le logo du Kagyu Mönlam
La terre va mal nous traiter et nous laisser tomber. Si la terre nous rejette, où irons nous vivre ? On entend parler d’aller sur d’autres planètes où la survie est possible, mais ce serait limité à quelques gens riches. Que deviendrons-nous alors, nous les êtres incapables de partir ? Maintenant que la situation est devenue très grave, que nous reste t-il à faire ? Les êtres vivants sur cette terre et les éléments de la nature doivent se donner la main – la terre ne doit pas nous laisser tomber et nous les êtres ne doivent pas abandonner la terre. Chacun doit se donner la main. C’est pourquoi le logo du Meunlam ressemble à deux mains qui s’entrecroisent. Ce dessin en rappelle un autre, dessiné par le 16ème Karmapa, intitulé « Le drapeau d’un rêve de paix et de sérénité », couramment utilisé chez les Karma Katsang. Si j’en avais inventé un autre, je douterai de son pouvoir, mais en choisissant ce dessin comme modèle, il devient peut-être source de bénédictions. Ce logo du Kagyu Meunlam concerne le bien de toute la Terre. Nous n’abandonnerons pas la Terre ! Puisse la paix advenir sur terre. Puisse t-elle demeurer pour des milliers d’années à venir. Les aspirations accomplies pendant le Kagyu Meunlam sont représentées par le symbole qu’incarne le logo du Meunlam. Je pense qu’il deviendra de même le symbole de personnes qui affectionnent la terre et qui souhaitent la protéger.
En ce moment, les températures changent de façon notable tout autour du globe, créant un grand danger pour la terre. Autrefois les disciples Kagyupa vivaient uniquement en retraite dans les montagnes, notamment dans des ermitages agréables- des grottes ou des cabanes de pierres- et il n’était pas alors nécessaire de creuser et de miner le sol, ni de couper les arbres. Ce n’est que bien plus tard que les méditants du Mahamoudra sont devenus des actifs, trop occupés. Peut être du fait de l’augmentation de leur activité pour le bénéfice des êtres et de l’enseignement, ou peut être du dicton : “Plus on médite sur le Mahamoudra plus on devient affairé”. Les pratiquants de la lignée de la contemplation ne surent plus vivre en altitude entre neige et roc. C’est alors qu’ils descendirent dans les vallées, où ils durent construire des monastères.
Maintenant on entend nombre de monastères Kagyu dire : « Nous construisons un nouveau monastère », et sans aucun scrupule, on supprime des arbres, ou même des forets entières qui poussent sur le site du projet, et ceci peut être très dangereux pour l’environnement. Certains monastères vont jusqu’a vendre des coupes de bois autour des temples. En faisant cela, nous ne réalisons pas sur le moment le mal engendré, et quelques années plus tard, un tas de problèmes écologiques se posent autour du site. Ce qu’on appelle l’essence de la terre, l’essence de cet endroit précis, se retrouve endommagé ; on pense alors, et beaucoup trop tard : « Non ! Mais qu’avons-nous fait ! ». Pour un seul arbre, il faut 20 ou 30 ans pour atteindre sa taille adulte. Il ne grandi pas dès qu’on le plante ! C’est donc pour ces raisons qu’il faut comprendre que si dans nos monastères en Inde, au Népal et au Tibet, on n’arrive pas à concevoir l’immensité des êtres dans l’espace sans limite, ce n’est pas grave. Mais nous vivons sur cette terre, et cela, chacun peut le voir. Si notre terre est détruite à cause du changement climatique, nous les Kagyus, nous ne serons plus là, plus aucun Karma Katsang ! Nous aurons tous disparu ! En aucun cas nos protecteurs du Dharma tel que Mahakala Bernachèn pourront nous sauver de là, avec toute la terre détruite, et nous les seuls survivants. Cela n’est pas un cas de figure possible. Voila pourquoi nous devons nous occuper de la protection de l’environnement et nous devons donner à nos monastères l’information nécessaire sur les moyens à mettre en œuvre. Arrêtons de creuser et de construire exclusivement, et agissons aussi pour protéger la nature. On peut lire dans les sutras et les tantras quels sont les bénéfices résultant de la protection des endroits sacrés. Il en va de même pour la terre. La terre est en danger et a besoin de notre aide ; alors nous devons faire notre possible pour protéger l’environnement de tous les êtres de ce monde. Même si on ne fait rien d’autre, on peut au moins expliquer les choses élémentaires à faire, et comment tout cela marche. Chaque jour il est bon de renouveler notre engagement à protéger l’environnement, que l’on soit laïc ou monial.
La majorité de notre assemblée aujourd’hui a une relation avec la culture tibétaine, sa langue et sa religion. Nous venons de l’Inde, du Bhoutan, du Sikkim et du Népal et c’est la raison pour laquelle nous devons tourner notre attention vers la défense de l’environnement au Tibet afin de protéger le nôtre, ici même. En effet, c’est du Tibet que provient une grande quantité de l‘eau potable de 8 pays d’Asie dont l’Inde. Et donc, si la nature est détruite au Tibet, c’est toute l’Asie qui sera touchée. Si l’écosystème hydraulique ne fonctionne plus proprement, nombre de catastrophes vont en découler, telles les inondations du fleuve Yantsé. Quand ces grands fleuves débordent, cela crée des dégâts considérables comme les inondations. Le gouvernement chinois s’est désormais engagé dans des projets de reforestation au Tibet. L’Inde ainsi que d’autres pays portent aussi leur regard vers la préservation de la nature au Tibet, c’est une question de première importance. Dès que nous voulons nous exprimer, nous les tibétains, c’est pour proclamer que le Tibet appartient aux tibétains mais que faisons nous en fait, nous les tibétains pour le Tibet ? Sommes-nous entrain de protéger l’environnement du Tibet, ou sommes nous en train de le détruire ? C’est une tradition chez nous d’avoir des vieilles croyances. Par exemple, si il y a une montagne impressionnante et très majestueuse, on croit qu’elle est la demeure d’un esprit et on croit alors que, devenant un lieu sacré, personne ne peut plus y toucher, ni la déranger en la creusant ou la minant. Si il y a une forêt superbe ou même un seul rocher ou une falaise avec une forme particulière, on décide alors que cet endroit est habité par un esprit. Cette croyance est très commode. Dans mon enfance, on n’osait pas aller jouer sur ces montagnes consacrées par les déités locales qui y séjournent. On n’osait même pas mettre le pied dessus sans parler d’avoir l’idée de déranger ces déités en aucune façon. On n’avait pas le droit de mettre la main dans l’eau des ruisseaux qui nous fournissaient en eau potable.
D’une part pour ne pas polluer l’eau et d’autre part pour ne pas agacer les nagas. Pour se laver les mains ou les pieds avec cette eau, on devait la puiser avec un seau, et aller se laver plus loin. En aucun cas, on ne pouvait se laver dans le courant, ni faire la vaisselle ou la lessive, ni verser des produits chimiques. Ce genre de croyances était répandu partout. Maintenant, surtout chez les plus jeunes, les gens pensent que c’est de la foi aveugle, de la superstition religieuse. La protection de la nature qui découlait de ce genre de croyances est en train de se perdre notablement. Cette façon traditionnelle de voir les choses se perd sans être remplacé par une éducation scientifique moderne sur la protection de l’environnement.
Au Tibet, l’intérêt unique des gens est de s’enrichir en développant l’économie. Les gens hésitent entre monter une ferme industrielle, construire une maison immense ou s’acheter des voitures. C’est cette mentalité qui prédomine de nos jours ! Et les maisons dans le style du pays qu’ils construisent maintenant, demandent une quantité de bois encore plus grande que traditionnellement. Autrefois ce n’était que dans les monastères que l’on trouvait les sculptures et les boiseries de décoration, mais de nos jours, les gens en mettent partout dans leur maison : fenêtres sculptées, encadrements de portes. Cela a de l’allure mais cela gâche beaucoup de bois. Quand les forêts seront détruites, rien ne sera plus la pour retenir l’eau des crues, pour drainer les inondations, ou pour maintenir la terre lors des tremblements de terre.
De nos jours, nombre de fermes industrielles d’élevage qui n’existaient pas avant, parce qu’elles n’étaient pas nécessaires, voient le jour au Tibet. Elles sont faciles à monter : élevage de porcs, de poulets, de canards et divers bétails. Les animaux reçoivent des injections de médicaments pour les engraisser et prennent des drogues chimiques. Les fermes industrielles se développent en nombre, et tout ce bétail produit du fumier et du gaz méthane qui pollue l’atmosphère, et salie la nature. Il est vraiment nécessaire de réfléchir à tout cela. Le Tibet, le toit du monde est propre et pure. Notre beau pays, faisons attention de ne pas le dévaster nous-même. Même si personne d’autre ne s’en occupe, prenons en soin, c’est notre honneur de tibétain et notre responsabilité. Nous avons déjà tant perdu de ce que l’on avait. Si nous laissons ce qu’il nous reste en mains être détruit, rien ne va plus rester de tibétain. Même si on arrive à un accord et une conquête de liberté pour le Tibet, quel genre de pays natal irons nous retrouver si tout est dévasté ? Si on laisse le Tibet devenir un horrible terrain vague, même si notre liberté est retrouvée, cela ne va pas nous apporter le bonheur. Une des raisons pour lesquelles cela se passe ainsi- et cela est de notre faute –est que nous ne sommes pas axés sur l’éducation. Plus on s’intéresse à connaître l’environnement, plus on va aimer la nature et en prendre soin. L’environnement au Tibet est exceptionnel, encerclé de pics enneiges qui le protège de la pollution atmosphérique. Il est de notre devoir d’informer la population et de protéger cet environnement naturellement pur. Nous devons aussi protéger l’environnement de toute la planète en vue du futur, mais en particulier celui du Tibet, et de toute la chaîne himalayenne. Le Tibet est probablement la plus grande réserve d’eau potable du monde entier. Il faut y réfléchir à l’intérieur de nos monastères. Je pense qu’il serait bon que chacun de nos monastères au Tibet, en Inde et au Népal s’organisent pour s’intéresser de près à la question de l’environnement. Je ne suis pas un expert en écologie, mais il y a certains aspects à comprendre, et d’autres à mettre en œuvre indiscutablement. Si on peut procurer l’information et l’éducation aux moniaux et aux familles associées à ces monastères ce sera très bénéfique à titre individuel et communautaire.
En premier, considérons le problème des voitures. C’est souvent le cas que dès qu’un lama termine la retraite de trois ans, il s’achète un camion. Un jour, à Tsourpou, quelqu’un demandait à un jeune novice ce qu’il voudrait faire plus tard, celui-ci répondit : « Je serai lama ». « Et que veux tu faire quand tu seras lama ? ». « Je ferai une retraite de trois ans, je m’achèterai un camion, le livre Toh de Karma Chagmé, et je voyagerai ». Le petit novice avait vu les lamas faire ainsi. Voilà ce que pensent les enfants de ce que les lamas font. Chaque lama à sa propre voiture et doit remplir le réservoir. Comme les réserves pétrolières diminuent, les coûts augmentent de plus en plus. Pourquoi les lamas ont-t-ils besoin de véhicules personnels ? En plus, les lamas veulent des voitures de luxe qui consomme un maximum, sinon ils n’auront pas le sentiment d’avoir le standing d’un lama ! Je me demande vraiment si cela est en accord avec l’exemple de la vie des maîtres du passé, qui insistait sur la diminution des désirs et le contentement avec le peu qu’ils possédaient. Les lamas sont des pratiquants du dharma- moines ou laïcs- c’est-à-dire satisfaits de ce qu’ils ont et ayant peu de désirs. Ils ne devraient pas courir derrière les 8 intérêts mondains (8 dharmas mondains), même si de bonnes choses leur arrivent d’elles-mêmes. Ce n’est plus le cas de nos jours et c’est un problème. Il faut reconsidérer la nécessité de l’achat de nos voitures et en particulier de celles qui consomment beaucoup. Essayons de nous maîtriser ! C’est aussi un tort du point de vue de la population locale. Nous sommes en majorité des réfugiés. Les locaux deviendront jaloux si nous sommes au volant de voitures plus luxueuses que les leurs. Ce n’est pas approprié de faire ainsi et cela est inutile.
En second lieu, considérons l’énergie solaire et l’énergie éolienne. Ces énergies sont fréquemment utilisées dans les régions isolées du Tibet et cela est une bonne chose. La production d’électricité est coûteuse, et en produire sans se soucier des dégâts éventuels est dangereux. Le monastère de Tsourpou n’avait pas d’électricité avant l’installation de panneaux solaires. Les panneaux solaires sont d’autant plus coûteux, si l’on doit pourvoir aux besoins de grands bâtiments. Mais les énergies éoliennes et solaires sont meilleures car elles n’ont pas de frais de fonctionnement et sont inoffensives pour la nature. Au Tibet, où le soleil brille intensément –c’est le toit du monde- beaucoup de gens utilisent le solaire. Dans nos monastères, en raison d’un nombre important de résidents, nos factures d’électricité sont élevées. Comme nous dépensons beaucoup, il faudrait penser à économiser l’électricité. Par exemple en ne laissant pas les lumières allumées quand il fait jour. Troisièmement, je parlerai de la plantation d’arbres. Nous ne sommes pas autorisés en temps que moines à couper des arbres ou des plantes qui donnent des fruits. Planter un arbre, c’est aider un grand nombre d’êtres à vivre. Je pense même que ce serait mieux de planter un seul arbre, plutôt que de sauver des vies d’animaux capturés en les relâchant.
L’année dernière, mon conseil a été de sauver des vies animales et d’arrêter de manger des produits animaux au profit de la longue vie de Sa Saintété le Dalai Lama et de la mienne, ainsi qu’aux anciens lamas de la lignée afin qu’ils restent longtemps encore parmi nous. Cette année, je pense qu’il serait bon pour chacun de nos monastères de planter au moins un millier d’arbres. Quand je parle de planter, ce n’est pas seulement autour des monastères. Vous pouvez rentrer en contact avec des associations qui reboisent des forêts, ou encore vous pouvez vous joindre à d’autres pour ce projet. Cela concerne nos monastères qui ont assez de ressources. Si vous n’avez pas les moyens, c’est un autre problème. Mais quelques uns ont de l’argent et souhaitent faire quelque chose pour prolonger la vie de leur lama. Voilà donc ma recommandation pour cette année : que chaque monastère plante 1000 ou 2000 arbres. Si le monastère ne peut le faire, les moines individuellement peuvent s’en occuper. Les bienfaiteurs seront les bienvenus. Les moines disent qu’ils n’ont pas d’argent et je me demande comment ils le dépensent en fait. Ce serait bien de planter une forêt verte au bénéfice de tous les êtres et tout particulièrement pour le Tibet, qui offre un territoire immense à reboiser. Quand les monastères doivent faire des coupes, il serait bien de replanter en plus grand nombre encore. Déboiser sans reboiser est une façon de perturber les déités locales et les nagas.
Le quatrième point ne nous concerne pas en temps que moine puisque nous ne sommes pas agriculteurs. Les cultivateurs versent des engrais chimiques sur les champs pour améliorer les récoltes. J’ai entendu dire que la première récolte est alors très productive mais par la suite le sol est infertile et devient comme du sable. Le sol est épuise par les engrais chimiques. Il y a beaucoup de fermes agricoles au Tibet et quand on ensemence un champ on ne devrait pas penser que c’est le notre et que l’on peut faire ce que l’on veut avec. Les moines ne participent pas aux travaux des champs mais leur familles et amis le font et si l’on n’agit pas d’un effort commun ce sera difficile d’être efficace sur l’environnement.
Il y a deux situations possibles au cours desquelles la race humaine progresse. Dans l’une, c’est la peur qui fait avancer et c’est aussi le cas pour les animaux. Sentant un danger qui menace leur vie, la peur ou la terreur amène à une solution pour y remédier. Dans l’autre situation, l’humain progresse du fait de son pouvoir d’anticipation et de prévision d’un résultat bénéfique. Nous sommes dotés d’un cerveau et d’intelligence, mais si on perd son temps à ne rien faire de spécial, on sera juste une personne qui tient de la place, quelqu’un de plus pour grossir le nombre sans aucun avantage pour personne. Maintenant que nous sommes vivants, nous devons faire preuve d’intelligence et avoir une vision d’avenir ; alors seulement notre existence dans ce monde prendra un sens, on ne sera pas une bouche inutile. On deviendra bénéfique pour les êtres avec lesquels nous vivons sur cette terre. La protection de l’environnement est un immense problème d’actualité, mais ce n’est pas pour cette raison la que je me débats sur un trône à vous en parler. Notre maître Bouddha et nombre de ses disciples réalisés, ont annoncé des prophéties sur la dégénérescence de notre époque : la dégénérescence des êtres et la dégradation de l’environnement. Ces sujets abordés dans des prophéties ne sont pas l’objet de notre attention. On ne fait que les citer, ici et là.
A ce propos voila une histoire qui se passe pendant les bouleversements politiques au Tibet en 1950. Le précèdent Pawo Rinpoché, en lisant les prophéties de Gourou Rinpoché, Padmasambhava, pensant qu’elles allaient sûrement se réaliser, les montra a son secrétaire en disant : « Voilà ce qui va se passer, ce sont des prédictions écrites par Padmasambava, nous ne devons pas rester ici, nous devons prendre la fuite et nous exiler » Chaque fois qu’il lui reparlait de cette prédiction, son secrétaire lui redisait « Ainsi soit il ! Je prends refuge en le Bouddha ». Il portait le texte à son front en signe de respect et le reposait de côté. Puis la situation empira tant, que le Karmapa prit la fuite vers l’Inde. Quand Pawo Rinpoché en reçut la nouvelle, il dit : « Les prophéties étaient justes, même Karmapa s’est enfui. Si nous ne faisons de même, que va-t-il nous arriver ? ». Et son secrétaire de répondre : « Comment est- ce possible ? Il y a les trois grands monastères de Séra, Drépung et Gandèn, le palais du Potala qui abrite le gouvernement tibétain, tout quitter n’est pas chose facile. Si vous vous préparer à partir, il ne nous restera aucune chance de rester ». Il s’obstina tellement qu’il refusa de ne faire aucun projet de départ. Manquait- il d’éducation ou bien avait- il trop de laisser-aller parce qu’il n’avait jamais eu à faire face a des situations difficiles dans sa vie ? En tous cas, le secrétaire ne partit jamais en Inde et eut à souffrir horriblement. Il fut déporté en camp de travail où il dut subir des tortures et des sanctions atroces auxquelles il succomba.
En fait, nous nous comportons de la même façon. Le Bouddha et d’autres maîtres du passé ont beaucoup insisté sur le besoin de protéger l’environnement, les forêts et la nature. Mais quand nous lisons ces textes, nous les portons à notre front en prenant refuge. Nous sommes capables de faire de belles déclarations « Puisse cela ou ceci se passer ! Puisse le bénéfice des êtres être advenir dans tout l’espace ! ». Mais nos souhaits ne sont pas issus d’une compréhension altruiste. Nous errons sans cesse dans l’océan de la souffrance, qu’est le samsara, parce que nos souhaits et nos actes ne sont pas en accord les uns avec les autres, et vont à l’inverse les uns des autres. Si nous perpétuons cette façon d’être, nous resterons toujours dans le samsara.
Merci de garder cette pensée à l’esprit.
Traduction anglaise du tibétain : Ringu Tulku Rinpoché et Karma Choephel
Traduction française : www.kagyuoffice-fr.org
Sa Sainteté le 17ème Karmapa
www.kagyuoffice-fr.org
Par Sa Sainteté le 17ème Karmapa
Conseils du 17ème Karmapa sur la Protection de l’Environnement
(A l’occasion du 25ème Kagyu Monlam à Bodhgaya, Décembre 2007) Protégeons l’environnement
Depuis le début de la race humaine, nous avons exploité la terre au maximum. 99 % des ressources de notre monde viennent de la nature et nous sommes en train d’user notre terre. Cette terre nous a donné des bienfaits sans mesure, mais qu’avons nous fait pour elle ? Nous lui demandons toujours quelque chose mais nous n’avons jamais rien à lui offrir en retour. Nous n’avons ni pensées bienveillantes ni amour envers elle. Dès qu’un arbre ou une plante sort de la terre, nous les coupons. La moindre parcelle de terre est l’objet de querelles. Jusqu’a présent, nous sommes engagés dans un cycle incessant de guerres et de disputes à son égard sans vraiment avoir rien fait pour elle. Désormais, la terre se renfrogne et nous abandonne. Sa Sainteté présentant le logo du Kagyu Mönlam
Sa Sainteté présentant le logo du Kagyu Mönlam
La terre va mal nous traiter et nous laisser tomber. Si la terre nous rejette, où irons nous vivre ? On entend parler d’aller sur d’autres planètes où la survie est possible, mais ce serait limité à quelques gens riches. Que deviendrons-nous alors, nous les êtres incapables de partir ? Maintenant que la situation est devenue très grave, que nous reste t-il à faire ? Les êtres vivants sur cette terre et les éléments de la nature doivent se donner la main – la terre ne doit pas nous laisser tomber et nous les êtres ne doivent pas abandonner la terre. Chacun doit se donner la main. C’est pourquoi le logo du Meunlam ressemble à deux mains qui s’entrecroisent. Ce dessin en rappelle un autre, dessiné par le 16ème Karmapa, intitulé « Le drapeau d’un rêve de paix et de sérénité », couramment utilisé chez les Karma Katsang. Si j’en avais inventé un autre, je douterai de son pouvoir, mais en choisissant ce dessin comme modèle, il devient peut-être source de bénédictions. Ce logo du Kagyu Meunlam concerne le bien de toute la Terre. Nous n’abandonnerons pas la Terre ! Puisse la paix advenir sur terre. Puisse t-elle demeurer pour des milliers d’années à venir. Les aspirations accomplies pendant le Kagyu Meunlam sont représentées par le symbole qu’incarne le logo du Meunlam. Je pense qu’il deviendra de même le symbole de personnes qui affectionnent la terre et qui souhaitent la protéger.
En ce moment, les températures changent de façon notable tout autour du globe, créant un grand danger pour la terre. Autrefois les disciples Kagyupa vivaient uniquement en retraite dans les montagnes, notamment dans des ermitages agréables- des grottes ou des cabanes de pierres- et il n’était pas alors nécessaire de creuser et de miner le sol, ni de couper les arbres. Ce n’est que bien plus tard que les méditants du Mahamoudra sont devenus des actifs, trop occupés. Peut être du fait de l’augmentation de leur activité pour le bénéfice des êtres et de l’enseignement, ou peut être du dicton : “Plus on médite sur le Mahamoudra plus on devient affairé”. Les pratiquants de la lignée de la contemplation ne surent plus vivre en altitude entre neige et roc. C’est alors qu’ils descendirent dans les vallées, où ils durent construire des monastères.
Maintenant on entend nombre de monastères Kagyu dire : « Nous construisons un nouveau monastère », et sans aucun scrupule, on supprime des arbres, ou même des forets entières qui poussent sur le site du projet, et ceci peut être très dangereux pour l’environnement. Certains monastères vont jusqu’a vendre des coupes de bois autour des temples. En faisant cela, nous ne réalisons pas sur le moment le mal engendré, et quelques années plus tard, un tas de problèmes écologiques se posent autour du site. Ce qu’on appelle l’essence de la terre, l’essence de cet endroit précis, se retrouve endommagé ; on pense alors, et beaucoup trop tard : « Non ! Mais qu’avons-nous fait ! ». Pour un seul arbre, il faut 20 ou 30 ans pour atteindre sa taille adulte. Il ne grandi pas dès qu’on le plante ! C’est donc pour ces raisons qu’il faut comprendre que si dans nos monastères en Inde, au Népal et au Tibet, on n’arrive pas à concevoir l’immensité des êtres dans l’espace sans limite, ce n’est pas grave. Mais nous vivons sur cette terre, et cela, chacun peut le voir. Si notre terre est détruite à cause du changement climatique, nous les Kagyus, nous ne serons plus là, plus aucun Karma Katsang ! Nous aurons tous disparu ! En aucun cas nos protecteurs du Dharma tel que Mahakala Bernachèn pourront nous sauver de là, avec toute la terre détruite, et nous les seuls survivants. Cela n’est pas un cas de figure possible. Voila pourquoi nous devons nous occuper de la protection de l’environnement et nous devons donner à nos monastères l’information nécessaire sur les moyens à mettre en œuvre. Arrêtons de creuser et de construire exclusivement, et agissons aussi pour protéger la nature. On peut lire dans les sutras et les tantras quels sont les bénéfices résultant de la protection des endroits sacrés. Il en va de même pour la terre. La terre est en danger et a besoin de notre aide ; alors nous devons faire notre possible pour protéger l’environnement de tous les êtres de ce monde. Même si on ne fait rien d’autre, on peut au moins expliquer les choses élémentaires à faire, et comment tout cela marche. Chaque jour il est bon de renouveler notre engagement à protéger l’environnement, que l’on soit laïc ou monial.
La majorité de notre assemblée aujourd’hui a une relation avec la culture tibétaine, sa langue et sa religion. Nous venons de l’Inde, du Bhoutan, du Sikkim et du Népal et c’est la raison pour laquelle nous devons tourner notre attention vers la défense de l’environnement au Tibet afin de protéger le nôtre, ici même. En effet, c’est du Tibet que provient une grande quantité de l‘eau potable de 8 pays d’Asie dont l’Inde. Et donc, si la nature est détruite au Tibet, c’est toute l’Asie qui sera touchée. Si l’écosystème hydraulique ne fonctionne plus proprement, nombre de catastrophes vont en découler, telles les inondations du fleuve Yantsé. Quand ces grands fleuves débordent, cela crée des dégâts considérables comme les inondations. Le gouvernement chinois s’est désormais engagé dans des projets de reforestation au Tibet. L’Inde ainsi que d’autres pays portent aussi leur regard vers la préservation de la nature au Tibet, c’est une question de première importance. Dès que nous voulons nous exprimer, nous les tibétains, c’est pour proclamer que le Tibet appartient aux tibétains mais que faisons nous en fait, nous les tibétains pour le Tibet ? Sommes-nous entrain de protéger l’environnement du Tibet, ou sommes nous en train de le détruire ? C’est une tradition chez nous d’avoir des vieilles croyances. Par exemple, si il y a une montagne impressionnante et très majestueuse, on croit qu’elle est la demeure d’un esprit et on croit alors que, devenant un lieu sacré, personne ne peut plus y toucher, ni la déranger en la creusant ou la minant. Si il y a une forêt superbe ou même un seul rocher ou une falaise avec une forme particulière, on décide alors que cet endroit est habité par un esprit. Cette croyance est très commode. Dans mon enfance, on n’osait pas aller jouer sur ces montagnes consacrées par les déités locales qui y séjournent. On n’osait même pas mettre le pied dessus sans parler d’avoir l’idée de déranger ces déités en aucune façon. On n’avait pas le droit de mettre la main dans l’eau des ruisseaux qui nous fournissaient en eau potable.
D’une part pour ne pas polluer l’eau et d’autre part pour ne pas agacer les nagas. Pour se laver les mains ou les pieds avec cette eau, on devait la puiser avec un seau, et aller se laver plus loin. En aucun cas, on ne pouvait se laver dans le courant, ni faire la vaisselle ou la lessive, ni verser des produits chimiques. Ce genre de croyances était répandu partout. Maintenant, surtout chez les plus jeunes, les gens pensent que c’est de la foi aveugle, de la superstition religieuse. La protection de la nature qui découlait de ce genre de croyances est en train de se perdre notablement. Cette façon traditionnelle de voir les choses se perd sans être remplacé par une éducation scientifique moderne sur la protection de l’environnement.
Au Tibet, l’intérêt unique des gens est de s’enrichir en développant l’économie. Les gens hésitent entre monter une ferme industrielle, construire une maison immense ou s’acheter des voitures. C’est cette mentalité qui prédomine de nos jours ! Et les maisons dans le style du pays qu’ils construisent maintenant, demandent une quantité de bois encore plus grande que traditionnellement. Autrefois ce n’était que dans les monastères que l’on trouvait les sculptures et les boiseries de décoration, mais de nos jours, les gens en mettent partout dans leur maison : fenêtres sculptées, encadrements de portes. Cela a de l’allure mais cela gâche beaucoup de bois. Quand les forêts seront détruites, rien ne sera plus la pour retenir l’eau des crues, pour drainer les inondations, ou pour maintenir la terre lors des tremblements de terre.
De nos jours, nombre de fermes industrielles d’élevage qui n’existaient pas avant, parce qu’elles n’étaient pas nécessaires, voient le jour au Tibet. Elles sont faciles à monter : élevage de porcs, de poulets, de canards et divers bétails. Les animaux reçoivent des injections de médicaments pour les engraisser et prennent des drogues chimiques. Les fermes industrielles se développent en nombre, et tout ce bétail produit du fumier et du gaz méthane qui pollue l’atmosphère, et salie la nature. Il est vraiment nécessaire de réfléchir à tout cela. Le Tibet, le toit du monde est propre et pure. Notre beau pays, faisons attention de ne pas le dévaster nous-même. Même si personne d’autre ne s’en occupe, prenons en soin, c’est notre honneur de tibétain et notre responsabilité. Nous avons déjà tant perdu de ce que l’on avait. Si nous laissons ce qu’il nous reste en mains être détruit, rien ne va plus rester de tibétain. Même si on arrive à un accord et une conquête de liberté pour le Tibet, quel genre de pays natal irons nous retrouver si tout est dévasté ? Si on laisse le Tibet devenir un horrible terrain vague, même si notre liberté est retrouvée, cela ne va pas nous apporter le bonheur. Une des raisons pour lesquelles cela se passe ainsi- et cela est de notre faute –est que nous ne sommes pas axés sur l’éducation. Plus on s’intéresse à connaître l’environnement, plus on va aimer la nature et en prendre soin. L’environnement au Tibet est exceptionnel, encerclé de pics enneiges qui le protège de la pollution atmosphérique. Il est de notre devoir d’informer la population et de protéger cet environnement naturellement pur. Nous devons aussi protéger l’environnement de toute la planète en vue du futur, mais en particulier celui du Tibet, et de toute la chaîne himalayenne. Le Tibet est probablement la plus grande réserve d’eau potable du monde entier. Il faut y réfléchir à l’intérieur de nos monastères. Je pense qu’il serait bon que chacun de nos monastères au Tibet, en Inde et au Népal s’organisent pour s’intéresser de près à la question de l’environnement. Je ne suis pas un expert en écologie, mais il y a certains aspects à comprendre, et d’autres à mettre en œuvre indiscutablement. Si on peut procurer l’information et l’éducation aux moniaux et aux familles associées à ces monastères ce sera très bénéfique à titre individuel et communautaire.
En premier, considérons le problème des voitures. C’est souvent le cas que dès qu’un lama termine la retraite de trois ans, il s’achète un camion. Un jour, à Tsourpou, quelqu’un demandait à un jeune novice ce qu’il voudrait faire plus tard, celui-ci répondit : « Je serai lama ». « Et que veux tu faire quand tu seras lama ? ». « Je ferai une retraite de trois ans, je m’achèterai un camion, le livre Toh de Karma Chagmé, et je voyagerai ». Le petit novice avait vu les lamas faire ainsi. Voilà ce que pensent les enfants de ce que les lamas font. Chaque lama à sa propre voiture et doit remplir le réservoir. Comme les réserves pétrolières diminuent, les coûts augmentent de plus en plus. Pourquoi les lamas ont-t-ils besoin de véhicules personnels ? En plus, les lamas veulent des voitures de luxe qui consomme un maximum, sinon ils n’auront pas le sentiment d’avoir le standing d’un lama ! Je me demande vraiment si cela est en accord avec l’exemple de la vie des maîtres du passé, qui insistait sur la diminution des désirs et le contentement avec le peu qu’ils possédaient. Les lamas sont des pratiquants du dharma- moines ou laïcs- c’est-à-dire satisfaits de ce qu’ils ont et ayant peu de désirs. Ils ne devraient pas courir derrière les 8 intérêts mondains (8 dharmas mondains), même si de bonnes choses leur arrivent d’elles-mêmes. Ce n’est plus le cas de nos jours et c’est un problème. Il faut reconsidérer la nécessité de l’achat de nos voitures et en particulier de celles qui consomment beaucoup. Essayons de nous maîtriser ! C’est aussi un tort du point de vue de la population locale. Nous sommes en majorité des réfugiés. Les locaux deviendront jaloux si nous sommes au volant de voitures plus luxueuses que les leurs. Ce n’est pas approprié de faire ainsi et cela est inutile.
En second lieu, considérons l’énergie solaire et l’énergie éolienne. Ces énergies sont fréquemment utilisées dans les régions isolées du Tibet et cela est une bonne chose. La production d’électricité est coûteuse, et en produire sans se soucier des dégâts éventuels est dangereux. Le monastère de Tsourpou n’avait pas d’électricité avant l’installation de panneaux solaires. Les panneaux solaires sont d’autant plus coûteux, si l’on doit pourvoir aux besoins de grands bâtiments. Mais les énergies éoliennes et solaires sont meilleures car elles n’ont pas de frais de fonctionnement et sont inoffensives pour la nature. Au Tibet, où le soleil brille intensément –c’est le toit du monde- beaucoup de gens utilisent le solaire. Dans nos monastères, en raison d’un nombre important de résidents, nos factures d’électricité sont élevées. Comme nous dépensons beaucoup, il faudrait penser à économiser l’électricité. Par exemple en ne laissant pas les lumières allumées quand il fait jour. Troisièmement, je parlerai de la plantation d’arbres. Nous ne sommes pas autorisés en temps que moines à couper des arbres ou des plantes qui donnent des fruits. Planter un arbre, c’est aider un grand nombre d’êtres à vivre. Je pense même que ce serait mieux de planter un seul arbre, plutôt que de sauver des vies d’animaux capturés en les relâchant.
L’année dernière, mon conseil a été de sauver des vies animales et d’arrêter de manger des produits animaux au profit de la longue vie de Sa Saintété le Dalai Lama et de la mienne, ainsi qu’aux anciens lamas de la lignée afin qu’ils restent longtemps encore parmi nous. Cette année, je pense qu’il serait bon pour chacun de nos monastères de planter au moins un millier d’arbres. Quand je parle de planter, ce n’est pas seulement autour des monastères. Vous pouvez rentrer en contact avec des associations qui reboisent des forêts, ou encore vous pouvez vous joindre à d’autres pour ce projet. Cela concerne nos monastères qui ont assez de ressources. Si vous n’avez pas les moyens, c’est un autre problème. Mais quelques uns ont de l’argent et souhaitent faire quelque chose pour prolonger la vie de leur lama. Voilà donc ma recommandation pour cette année : que chaque monastère plante 1000 ou 2000 arbres. Si le monastère ne peut le faire, les moines individuellement peuvent s’en occuper. Les bienfaiteurs seront les bienvenus. Les moines disent qu’ils n’ont pas d’argent et je me demande comment ils le dépensent en fait. Ce serait bien de planter une forêt verte au bénéfice de tous les êtres et tout particulièrement pour le Tibet, qui offre un territoire immense à reboiser. Quand les monastères doivent faire des coupes, il serait bien de replanter en plus grand nombre encore. Déboiser sans reboiser est une façon de perturber les déités locales et les nagas.
Le quatrième point ne nous concerne pas en temps que moine puisque nous ne sommes pas agriculteurs. Les cultivateurs versent des engrais chimiques sur les champs pour améliorer les récoltes. J’ai entendu dire que la première récolte est alors très productive mais par la suite le sol est infertile et devient comme du sable. Le sol est épuise par les engrais chimiques. Il y a beaucoup de fermes agricoles au Tibet et quand on ensemence un champ on ne devrait pas penser que c’est le notre et que l’on peut faire ce que l’on veut avec. Les moines ne participent pas aux travaux des champs mais leur familles et amis le font et si l’on n’agit pas d’un effort commun ce sera difficile d’être efficace sur l’environnement.
Il y a deux situations possibles au cours desquelles la race humaine progresse. Dans l’une, c’est la peur qui fait avancer et c’est aussi le cas pour les animaux. Sentant un danger qui menace leur vie, la peur ou la terreur amène à une solution pour y remédier. Dans l’autre situation, l’humain progresse du fait de son pouvoir d’anticipation et de prévision d’un résultat bénéfique. Nous sommes dotés d’un cerveau et d’intelligence, mais si on perd son temps à ne rien faire de spécial, on sera juste une personne qui tient de la place, quelqu’un de plus pour grossir le nombre sans aucun avantage pour personne. Maintenant que nous sommes vivants, nous devons faire preuve d’intelligence et avoir une vision d’avenir ; alors seulement notre existence dans ce monde prendra un sens, on ne sera pas une bouche inutile. On deviendra bénéfique pour les êtres avec lesquels nous vivons sur cette terre. La protection de l’environnement est un immense problème d’actualité, mais ce n’est pas pour cette raison la que je me débats sur un trône à vous en parler. Notre maître Bouddha et nombre de ses disciples réalisés, ont annoncé des prophéties sur la dégénérescence de notre époque : la dégénérescence des êtres et la dégradation de l’environnement. Ces sujets abordés dans des prophéties ne sont pas l’objet de notre attention. On ne fait que les citer, ici et là.
A ce propos voila une histoire qui se passe pendant les bouleversements politiques au Tibet en 1950. Le précèdent Pawo Rinpoché, en lisant les prophéties de Gourou Rinpoché, Padmasambhava, pensant qu’elles allaient sûrement se réaliser, les montra a son secrétaire en disant : « Voilà ce qui va se passer, ce sont des prédictions écrites par Padmasambava, nous ne devons pas rester ici, nous devons prendre la fuite et nous exiler » Chaque fois qu’il lui reparlait de cette prédiction, son secrétaire lui redisait « Ainsi soit il ! Je prends refuge en le Bouddha ». Il portait le texte à son front en signe de respect et le reposait de côté. Puis la situation empira tant, que le Karmapa prit la fuite vers l’Inde. Quand Pawo Rinpoché en reçut la nouvelle, il dit : « Les prophéties étaient justes, même Karmapa s’est enfui. Si nous ne faisons de même, que va-t-il nous arriver ? ». Et son secrétaire de répondre : « Comment est- ce possible ? Il y a les trois grands monastères de Séra, Drépung et Gandèn, le palais du Potala qui abrite le gouvernement tibétain, tout quitter n’est pas chose facile. Si vous vous préparer à partir, il ne nous restera aucune chance de rester ». Il s’obstina tellement qu’il refusa de ne faire aucun projet de départ. Manquait- il d’éducation ou bien avait- il trop de laisser-aller parce qu’il n’avait jamais eu à faire face a des situations difficiles dans sa vie ? En tous cas, le secrétaire ne partit jamais en Inde et eut à souffrir horriblement. Il fut déporté en camp de travail où il dut subir des tortures et des sanctions atroces auxquelles il succomba.
En fait, nous nous comportons de la même façon. Le Bouddha et d’autres maîtres du passé ont beaucoup insisté sur le besoin de protéger l’environnement, les forêts et la nature. Mais quand nous lisons ces textes, nous les portons à notre front en prenant refuge. Nous sommes capables de faire de belles déclarations « Puisse cela ou ceci se passer ! Puisse le bénéfice des êtres être advenir dans tout l’espace ! ». Mais nos souhaits ne sont pas issus d’une compréhension altruiste. Nous errons sans cesse dans l’océan de la souffrance, qu’est le samsara, parce que nos souhaits et nos actes ne sont pas en accord les uns avec les autres, et vont à l’inverse les uns des autres. Si nous perpétuons cette façon d’être, nous resterons toujours dans le samsara.
Merci de garder cette pensée à l’esprit.
Traduction anglaise du tibétain : Ringu Tulku Rinpoché et Karma Choephel
Traduction française : www.kagyuoffice-fr.org
Sa Sainteté le 17ème Karmapa
www.kagyuoffice-fr.org
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