L'Arbre des Refuges: Une Philosophie Non Confessionnelle

La seule façon d’apporter la paix au monde est d’apprendre soi-même à vivre en paix.( Bouddha « l’Éveillé » 623-543 av. J.-C )


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 10:56

    QUESTIONNER NOTRE VISION DU MONDE

    par Charles Genoud

    Ce texte constitue la deuxième partie d'une enseignement donné par Charles Genoud au Forum 104 en Juin 2003. Evelyne Boutron a assuré la transcription du texte, Gilbert Gauché la traduit dans sa forme actuelle et Florence Milles a assuré le travail de dactylographie. Merci infiniment à tous les trois pour ce travail considérable.

    L'entrée dans la recherche spirituelle
    Ce matin, j'ai parlé du " manque ", cause fondamentale de notre engagement dans une recherche, une quête spirituelle. S'il n'y avait aucun manque, si nous expérimentions une constante plénitude, le mouvement qui nous pousse à cette quête n'existerait certainement pas.
    De manière générale, cette quête peut être initiée par une expérience, un évènement qui nous semble anormal, qui nous fait nous questionner, car il sort de l'ordre habituel des choses. Il peut s'agir d'une expérience d'ordre affectif, social ou philosophique qui nous interpelle tout à coup et nous fait essayer de répondre à cette interpellation. Nous nous engageons alors dans une recherche, un questionnement, dans un approfondissement de notre connaissance de la réalité, de la réalité quotidienne.

    De telles expériences qui, pour nous, relèvent du désordre, peuvent créer le besoin de découvrir plus profondément la réalité du monde dans lequel nous vivons. Il peut s'agir, par exemple, de la mort d'une personne. Si nous imaginons la mort d'un proche, nous pouvons en ressentir l'impact affectif. Mais plus généralement, même dans le cas où il s'agirait de quelqu'un que nous connaissons peu, loin de nous, un impact d'ordre philosophique existe. C'est ce que Bataille exprimait en disant : " la mort trahit l'imposture de la réalité ". Cela veut dire que si la mort est possible, la réalité n'est pas telle que nous la percevons. Il y a incompatibilité entre le monde tel que nous le percevons et la mort d'une personne qui existerait réellement. Il n'est donc pas nécessaire qu'il s'agisse d'un proche donnant une dimension affective à l'évènement. Un choc d'ordre philosophique peut nous amener à questionner notre vision du monde, à nous dire qu'il y a peut-être quelque chose de faux dans la manière dont nous le percevons.

    Il y a deux ans, j'étais en Californie pour conduire une retraite. En me promenant à la périphérie de San Francisco, je suis entré dans une librairie. Je cherche souvent des livres d'auteurs français que j'aime bien, traduits en anglais, pour faire des citations. Les phrases sont parfois si précises que je ne veux pas faire la traduction moi-même.

    A ce moment là, je cherchais un livre de Maurice Blanchot. En le feuilletant, je suis tombé sur une phrase qui disait : " Le passé n'a jamais existé ". C'est une phrase extrêmement déroutante, qui n'est cependant pas celle d'un rêveur ou d'un poète, mais qui traduit une réflexion profonde, concluant que le passé n'a jamais existé. Si ce que dit Blanchot est juste, il est clair que notre vision ordinaire du monde doit être questionnée et changée. Si le passé n'a jamais existé, il est clair que la manière dont je vis, la façon dont je conçois le monde où je vis, ne sont pas en accord avec cette réalité. Tomber sur une telle phrase, sur une telle affirmation, peut être le facteur déclenchant qui nous fasse entrer en recherche, pour trouver un ordre plus profond permettant d'inclure cette réalité, d'établir un rapport au monde intégrant la non-existence du passé.

    Un destin inhabituel
    Joseph Kimpel, un professeur américain qui a beaucoup étudié les mythologies, a décrit le cheminement du héros, du chaman, du mystique, et a recherché des faits similaires dans les récits de leurs vies. Il en a trouvé plusieurs. Le premier est, qu'en général, ce futur chaman, saint ou sainte, mystique ou prophète, naît d'une manière inhabituelle, miraculeuse.

    Dès sa naissance, il est voué à un destin inhabituel. Il y a une rupture dans l'ordre établi. Puis, ce destin paraît oublié. L'enfant vit de manière tout à fait ordinaire, découvrant et partageant les valeurs ordinaires du monde : les valeurs sociales, la vision du monde qui prévaut à son époque. Jusqu'au jour où un évènement vient lui rappeler son destin. Tout à coup, quelque chose lui montre que l'ordre établi n'est pas juste, que quelque chose est faux dans la vision ordinaire du monde. Dès ce moment, il ne connaîtra plus de repos jusqu'à ce qu'il soit parvenu à une vision plus profonde, beaucoup plus vaste, lui permettant d'intégrer ce qu'il avait éprouvé comme un désordre. Ce besoin va le pousser à sortir du modèle établi, à le quitter, pour ne pas être complètement prisonnier des valeurs sociales, philosophiques, ayant cours, et à entrer d'une certaine manière en solitude, afin de trouver un ordre plus profond.

    Dans la vie du Bouddha, ce schéma apparaît de manière vraiment typique. Le Bouddha est conçu miraculeusement, alors que sa mère rêve qu'un éléphant blanc entre en elle. Il naît d'une façon étonnante qui, pour le moins, rompt avec l'ordre établi, puisqu'il sort de sa mère par le côté, alors qu'elle se tient à une branche. Et, lorsqu'elle présente le jeune enfant à un astrologue, celui-ci prédit qu'il deviendra soit un monarque universel, soit un être profondément éveillé. Tous les signes du destin sont ainsi réunis. La période d'oubli vient ensuite : le garçon reçoit l'éducation d'un jeune prince, il étudie les védas, les arts martiaux, complètement oublieux de ce qui était prédit à sa naissance, jusqu'à ce que certains évènements viennent le rappeler à son destin. Dans le récit de la vie du Bouddha, ces évènements sont présentés de manière extrêmement caricaturale : il rencontre la vieillesse, la maladie et la mort, ainsi qu'un religieux. Dans la légende, leur description est assez naïve. On a l'impression que c'est la première fois qu'il voit un vieillard, la première fois qu'il voit un malade, tout comme un cadavre. Mais, on peut imaginer que c'est effectivement la première fois qu'il en prend vraiment conscience. Alors qu'il sort du palais paternel, il comprend que la vieillesse, la maladie et la mort le concernent lui aussi et pas seulement les autres. Quand cette réalisation se produit, le futur bouddha n'a plus envie de rester au palais, de vivre dans une agréable insouciance, entouré de musiciens et de musiciennes, comme un jeune prince, cinq siècles avant J.C. Il n'a plus aucun repos. Tous les plaisirs deviennent insipides. Il n'a plus qu'un vœu, qu'un désir : quitter le palais pour s'engager dans une quête spirituelle.

    Son père refuse de le laisser partir. Il est donc obligé de s'enfuir pour devenir un ascète mendiant. Cela traduit combien l'ordre établi, que le jeune prince est en train de questionner, ne peut accepter son questionnement : le père s'oppose à ce qu'il sorte du palais. Dans la légende, le futur bouddha, profitant que tout le monde est endormi par un charme mystérieux, quitte le palais de nuit pour s'engager dans sa quête. C'est le prototype même du chemin du mystique, avec toutes ses étapes bien marquées.

    Chez certains chamans, saints ou saintes, il arrive parfois qu'une maladie soit le facteur qui leur fasse quitter l'ordre établi. Souvent, chez les chamans, il s'agit d'une maladie que les médecins ne peuvent soigner, car ils ne la connaissent pas. Ce n'est que lorsque le chaman rencontrera un autre chaman qu'il sera possible de la soigner, car elle n'est pas somatique mais d'ordre spirituel : c'est un déséquilibre spirituel. Il sera guéri par le maître chaman qui initiera ensuite l'ancien malade au chemin spirituel.

    Des phénomènes marquants se produisent de même dans la vie de certains saints ou saintes. Rappelons-nous de Sainte Thérèse d'Avila. Entrée extrêmement jeune au couvent, elle y tombe malade. Ramenée à la maison, on la croit morte. Selon la coutume, on fait couler de la cire sur ses yeux, mais son père qui adore tellement sa fille, refuse qu'on l'enterre et, le quatrième jour, alors qu'elle est encore dans le même état, elle ouvre les yeux. Ensuite, elle demande à retourner au couvent. Mais, pendant plus d'une année, elle ne peut marcher. D'abord, elle ne marche pas du tout. Ensuite, elle se traîne à quatre pattes… Constamment dans sa vie spirituelle, elle se réfèrera à cette expérience de mort symbolique qui rompt l'ordre établi.

    Les évènements ne sont pas toujours aussi marquants. Quelque chose de très simple, semblant ne pas correspondre à l'ordre du monde, peut suffire pour que surgisse la nécessité d'une compréhension plus profonde. On peut imaginer des scientifiques étudiant des équations, se rendant compte que quelque chose ne " marche pas ", essayant de trouver une manière de comprendre plus profonde. On peut même penser qu'un simple objet puisse suffire: une table placée à l'envers, une porte d'habitude fermée soudain ouverte qui, dans l'esprit d'une personne, fasse qu'elle questionne tout à coup l'ordre établi, prenne conscience qu'il ne fonctionne pas, et s'engage dans la recherche d'une vérité plus profonde.

    Nous partageons notre vision du monde. Chaque fois qu'il s'agit de la changer, des difficultés apparaissent. D'abord, il faut le courage de lâcher la façon courante de voir : lorsque Copernic enseigna que la terre n'était pas le centre de l'univers, mais le soleil, combien d'oppositions apparurent ! Des oppositions, non pas scientifiques, mais affectives, de l'ordre de la crainte.

    Tout à coup, apparaît une impossibilité de quitter la vision habituelle pour se rendre disponible à une vision différente, nouvelle. Pour la découvrir, il faut donc chaque fois pouvoir questionner celle qui prévaut, la lâcher, et s'ouvrir à la nouvelle.


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 10:57

    La notion du temps
    Dans notre vision particulière du monde, le temps s'écoule au sein d'un espace stable. D'abord cyclique chez les indiens, les grecs… la notion du temps devint linéaire avec la tradition biblique et surtout chrétienne. Il y a un point zéro. Puis une ligne vers le futur et une vers le passé. Mais ces deux façons de voir, cyclique ou linéaire, sont-elles les seules possibilités de se représenter la réalité et sont-elles justes ? Ne traduisent-elles pas une certains confusion ? Toutes les cultures voient-elles de même l'univers comme un espace stable dans lequel le temps s'écoule, où les évènements surgissent et disparaissent ?

    Un anthropologue américain, dont on a, par la suite, questionné la recherche, a trouvé que les indiens Hopis n'avaient pas de mots comme nous en avons dans les langues indo-européennes ou orientales, pour décrire le temps ; pas même pour passé, présent et futur. La notion d'un espace stable dans lequel le temps s'écoulerait leur serait donc étrangère. Leur vision du temps serait ainsi complètement différente, avec, par exemple, l'impossibilité d'additionner les jours puisque lorsqu'un jour a disparu, l'autre n'est pas encore là. Comment pourrait-on additionner des choses qui n'existent pas en même temps ? Comment additionner des minutes, puisqu'il est impossible d'avoir deux minutes, trois minutes en même temps ? Il n'y a donc pas de pluriel pour la notion de jour. Les Hopis s'expriment plutôt en termes de potentiel et de manifesté et non en termes d'espace stable dans lequel le temps se déroulerait. Mais cela ne les empêche pas de construire des maisons, de faire de l'agriculture, de répondre à tous les besoins pratiques d'un être humain, même si leur notion du temps est différente. Pour eux, deux évènements qui se passeraient au même instant en des endroits différents ne peuvent pas être simultanés, puisqu'on ne peut pas connaître l'un et l'autre à la fois : il faudrait se déplacer pour ce faire. On ne parlerait donc pas de simultanéité dans un tel cas.

    Quelle que soit la justesse de l'analyse de cet anthropologue, il est intéressant d'imaginer une manière de concevoir le monde dans laquelle les concepts d'un espace stable, au sein duquel le temps s'écoule, ne seraient pas pris en compte. On peut du reste constater que la science moderne remet également ces notions en question.

    De très longue date, les philosophes ont questionné le temps, comme Blanchot le fait en écrivant le " passé n'a jamais existé ". On trouve ce questionnement chez Saint Augustin, d'une manière extrêmement touchante. Il dit " Qu'est-ce que le temps ? Si personne ne me le demande, je n'ai pas de problème. Mais, dès qu'on me le demande, je ne sais plus ". Par moments, il appelle Dieu en aide et dit : "Dieu, aide-moi ". Il paraît complètement pris au dépourvu. Il essaie de s'y retrouver, mais n'y parvient pas. A la fin de ses confessions, on trouve ce très intense questionnement. Il dit : " Le passé n'est plus, l'avenir n'est pas encore et comment le présent pourrait-il se maintenir ? S'il se maintenait, il ne serait plus le présent, il serait l'éternité, donc il ne serait pas du temps ". Il cherche ainsi à s'y retrouver, avec beaucoup de difficulté mais beaucoup d'honnêteté.

    On a donc bien l'impression, comme le dit Saint Augustin, que le temps ne pose pas nécessairement de problème tant qu'on ne le questionne pas. Mais, dès qu'on cherche à définir ce que cette notion représente du point de vue de la réalité, et de la réalité de l'expérience, cela devient beaucoup plus difficile.


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 10:59

    La notion de durée

    Lorsque nous avons l'impression que notre vie s'inscrit dans la durée, nous passons de même de la réalité à l'imaginaire. Tant que nous vivons dans la durée, nous vivons dans l'imaginaire, dans une fiction qui s'approche peut-être de la réalité (je ne veux pas approfondir ici cette relation), qui peut sembler rebondir avec elle, mais qui est néanmoins l'imaginaire.

    Si, m'asseyant pour méditer, je pense le faire pendant quarante cinq minutes, je suis complètement dans l'imaginaire, car il est impossible de méditer pendant quarante cinq minutes. On ne peut méditer qu'un instant à la fois. Comment le pourrais-je pendant quarante cinq minutes ? Chaque instant est bien suffisant. Parfois, la méditation est lourde et fatigante car nous nous efforçons de méditer pendant quarante cinq minutes ! Il est donc important de nous rendre compte de ce fait, pour ne pas inscrire notre session assise dans la durée. Sinon, cela revient à conserver un filtre à l'esprit, qui s'interpose entre nous, notre conscience, notre présence et l'expérience elle-même. Résultat : au lieu d'être dans l'expérience, nous sommes dans le filtre. Nous contemplons un concept, la notion de temps et de durée. Cela peut être une cause de fatigue et de frustration.

    Tant que nous vivons dans la durée, la plénitude est impossible, car la durée est une fragmentation. Schématiquement, caricaturalement même, si je vis dans la durée, il y a une partie de moi au passé, une partie de moi au présent et une partie au futur. Le moi est fragmenté. Comment pourrais-je alors faire l'expérience de la plénitude, les parties au passé et au futur étant, qui plus est, imaginaires ? Comme il est constamment dit dans les traditions mystiques et yoguiques, l'accès à la plénitude demande de se dépouiller de la notion du temps. C'est une évidence. Comment pourrait-on être présent au passé, au futur ? Une plénitude au passé ou au futur n'est que fiction.

    Revenons maintenant à la phrase de Maurice Blanchot : " Le passé n'a jamais existé ", non pour lui donner un sens particulier, mais pour nous questionner. L'expérience de bouger ma main faite ce matin, ou bien une expérience qui s'est produite pendant la méditation, dont je ramène maintenant le souvenir à l'esprit, n'est que l'image, le concept des expériences elles-mêmes. Les images ou concept n'ont jamais existé autrement que dans l'ordre de l'image, du concept. Le passé n'est donc jamais autre chose qu'images, concepts de l'imaginaire. Si le passé était quelque chose de réel, il ne serait pas possible de le conserver. Est-ce clair ?
    En d'autres termes : ce que j'appelle passé n'est qu'une image de quelque chose qui ne peut être conservé, puisque cette chose est de l'ordre de l'expérience pure. C'est donc bien l'image - la conceptualisation de l'expérience pure - que maintenant j'appelle passé ; et pour que l'image soit disponible maintenant, il a fallu au moment de l'expérience que l'image, le concept, soit formé car, lui, peut-être mémorisé et conservé.
    Par conséquent, ce que nous appelons passé - ce que nous appelons futur - n'est jamais réel, n'est jamais une expérience, n'est que de l'ordre du pur imaginaire. Quand nous parlons du passé ou du futur, nécessairement, nous parlons de l'imaginaire et non des expériences réelles. Cela signifie qu'entre ce matin et il y a quatre mille ans, pas la moindre durée réelle n'existe, pas la moindre " distance ". La distance est fictive. Il n'y a en réalité aucune durée entre les deux, mais nous avons le pouvoir d'en créer la fiction.

    Dans notre pratique, il est important de reconnaître quand nous inscrivons notre méditation dans la durée. Le faire signifie clairement que nous passons dans l'ordre conceptuel et que nous ne sommes plus dans l'intimité de l'expérience même. Un chorégraphe français disait : " on peut penser le corps, mais il faut le penser pesant ". C'est une façon un peu paradoxale de s'exprimer pour dire que l'expérience du corps n'est pas une pensée. En le pensant pesant, ce qui a du poids n'est pas la pensée, mais l'expérience du corps elle-même. Et, à ce moment, nous ne sommes plus dans la pensée, mais dans l'expérience, qu'elle soit auditive, émotionnelle, tactile ou de tout autre nature. Revenir à l'expérience. Sans la juger. Sans l'évaluer. Sans vouloir la transformer. Sinon, de nouveau, nous glissons dans l'imaginaire, beaucoup plus superficiel, manquant d'intimité. Et, toujours, dans l'imaginaire, il y a quelque chose de l'ordre du manque.
    Il me semble donc essentiel de bien voir comment la notion du temps intervient dans la méditation, car elle constitue peut-être le préjugé le plus important que la force de l'habitude nous fait introduire dans la pratique - ce qui complique la tâche en rendant la méditation difficile, fatigante, longue. Et nous avons bien compris que la notion du temps n'est pas nécessairement reliée aux termes relatifs du temps : matin, soir, hier, demain, passé, futur…. Mais à tout mouvement qui vise autre chose que ce qui est, dans le présent. Dès que l'on vise autre chose, dès qu'un objectif intervient, elle est introduite. Il ne peut y avoir d'objectif sans la notion de durée. Dès qu'un objectif de transformation, d'amélioration existe, immédiatement nous sommes dans la durée.

    Essayez donc d'être conscients de ces notions. Lorsque nous prenons conscience de l'objectif, du souhait que nous pouvons avoir, lorsque nous le reconnaissons, il est alors possible de ne plus y adhérer. A ce moment, la pratique se simplifie car nous sommes en relation avec ce qui se passe maintenant. Le présent n'est jamais fatiguant. C'est vouloir le transformer qui nous épuise.

    Evidemment, les notions d'objectif, de transformation, sont fortement ancrées en nous. Nous les utilisons presque constamment dans la vie quotidienne. Nous sommes rémunérés pour obtenir des résultats, pour réaliser des objectifs… Et tout à coup, dans la pratique méditative, notre attitude est complètement différente, non plus de l'ordre de la transformation, du devenir, mais de l'ordre de l'être. Cela demande une autre sensibilité.

    Je voudrais terminer par une anecdote. Aux Etats-Unis, j'ai eu en entretien un jeune homme qui m'a dit : " lundi, je dois voir le patron de l'entreprise pour laquelle je travaille. A ce moment là, je devrais présenter mes objectifs. Pas des objectifs techniques particuliers, des objectifs de développement pour passer à un échelon supérieur. Il faut que je fasse un projet pour toute l'année. " Venant de passer une semaine à essayer d'être dans le présent, il se demandait : comment vais-je pouvoir parler à mon patron en adhérant à la nécessité de m'efforcer constamment de monter, alors que j'essaye, en fait, de m'arrêter, pour être dans le présent ?

    Evidemment, j'ai bien compati à son problème. Heureux de ne pas avoir de patron à qui rendre des comptes et qui me demanderait des projets pour toute l'année ! Cette anecdote a pour simple but de mettre en évidence que nous utilisons constamment les notions de temps et d'objectif pour fonctionner. Dans la méditation, nous développons la qualité d'être et non le devenir. Il s'agit donc de ne plus adhérer aux modèles du devenir. Et, ce n'est pas une question de décision, car les habitudes surgissent avec beaucoup de force. Constamment, nous allons nous surprendre à essayer d'améliorer notre méditation. Ce n'est pas un problème si nous ne croyons pas que ce soit ce qu'il faut faire. Si nous nous rendons compte que ce n'est pas le bon moyen, nous pouvons lâcher cette attitude lorsque nous en prenons conscience et rester dans l'expérience, telle qu'elle se présente. Mais, pour cela, il faut avoir bien compris que la transformation n'est pas le processus méditatif. Sinon, nous allons adhérer à l'idée de transformer et continuer d'agir ainsi.

    Je souhaitais vous transmettre aujourd'hui ces quelques réflexions sur l'intervention de la notion de temps, parce qu'elles me semblent très importantes dans la pratique. Aussi, pour alléger vos quarante cinq minutes d'assise, afin que la durée disparaissant, il n'y ait qu'un seul instant à la fois.


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 10:59

    Pendant ce week-end, nous essayons de consacrer la majeure partie de notre temps à la pratique, sans nous attacher aux concepts qui la sous-tendent. Il est cependant important de comprendre le contexte dans lequel elle s'inscrit. En effet, si des erreurs de compréhension interviennent, si la façon dont elle s'organise n'est pas bien vue, un obstacle peut en résulter au sein même de la pratique, des attitudes et un état d'esprit erronés.

    Attacher beaucoup d'importance à la pratique n'exclut donc pas la nécessité d'une certaine compréhension. Parmi vous, certains ont cité des passages de leurs lectures. Les sources sont bonnes. Mais, il est important de replacer les éléments qu'ils présentent dans le contexte où ils trouvent leur sens, en fonction de ce à quoi ils se réfèrent, et préciser aussi ce à quoi ils ne se réfèrent pas.

    Je vais donc, dans les grandes lignes, poser quelques éléments du contexte dans lequel la méditation s'inscrit, pour que nous comprenions bien sa pratique.

    Dans toutes les traditions bouddhiques, la pratique de la méditation comporte deux aspects : la concentration et la sagesse. En Pali, la langue des écritures anciennes, les termes sont : samatha pour la concentration, le calme, et vipassana pour la sagesse. Vipassana signifie voir d'une manière plus claire, plus " tranchante ".
    Ces deux pratiques sont organisées de manières distinctes et différentes. Néanmoins, dans certaines formes méditatives, elles peuvent se rejoindre et, finalement, elles se rejoignent toujours. Il existe aussi certaines techniques où elles sont jointes dès le début. Ici, je vais les expliquer séparément.

    La concentration
    Pour développer la concentration, le calme de l'esprit, il faut choisir un objet, un centre de référence, sur lequel nous allons poser notre esprit, à l'exclusion de toute autre chose. Pour faire image : c'est un peu comme si on liait l'esprit à un objet, à la manière dont on attache un cheval ou un chameau à un pieu, afin qu'il ne puisse pas se sauver. L'esprit doit rester fixé sur l'objet choisi, en excluant toute autre source d'intérêt. N'étant plus fasciné ou accaparé par d'autres types d'expérience, il va lentement se calmer.
    Dans la concentration, il y a donc un mouvement de saisie extrêmement clair : saisie d'une expérience, d'un objet et fixation de l'esprit sur cette expérience ou cet objet, à l'exclusion de tout autre. Il y a ainsi limitation et exclusion - une exclusion immense puisque tout est exclu, à l'exception d'une seule chose, d'une seule expérience ou d'un seul type d'expérience.

    La concentration est une capacité que nous possédons tous, nécessaire dans la vie professionnelle et dans la vie quotidienne, mais qui n'est pas suffisante lorsque nous voulons explorer notre propre nature et celle du monde. Un esprit doté d'un degré ordinaire de stabilité, tel que celui utilisé dans la vie quotidienne, n'est pas suffisamment stable ni rigoureux pour pouvoir questionner au niveau de profondeur nécessaire au développement de la sagesse. C'est pourquoi nous mettons en œuvre une pratique particulière, destinée à renforcer la capacité de concentration, afin qu'elle soit suffisante au moment où nous en aurons besoin.

    Pour ce faire, n'importe quel objet pourrait être choisi comme support. Traditionnellement, on utilise la respiration, un disque de couleur, la flamme d'une bougie, une image du Bouddha… ou d'autres éléments plus subtils tels que l'espace infini, la conscience infinie ou rien, qui requièrent déjà une plus grande stabilité d'esprit.
    La concentration comporte donc une limitation volontaire pour permettre à l'esprit de se calmer plus facilement. Mais, dans certains suttas, le Bouddha met en garde moines et nonnes pour qu'ils ne confondent pas de profonds degrés de concentration avec la sagesse - pour qu'ils ne prennent pas des expériences de concentration extrêmement profondes pour l'éveil. Dans les textes primitifs on trouve fréquemment des injonctions du Bouddha à ce sujet.


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 11:00

    La sagesse

    Le Sutta de base pour le développement de la sagesse - Vipassana - est le Satipatthanasutta. Il décrit l'établissement de l'attention qui va permettre l'intimité - intimité qui ouvre à la connaissance, à la sagesse. Alors que la concentration comporte l'exclusion, la sagesse, elle, nécessite une très profonde intimité avec l'expérience. Une intimité telle " qu'il n'y a pas deux, mais un ", une intimité telle qu'un concept ne peut jouer le rôle d'intermédiaire lorsqu'on vit l'expérience : si, entre le méditant et l'expérience existe l'espace d'un concept, ce n'est pas l'intimité nécessaire pour développer la sagesse. Il faut donc bien une intimité telle que l'expérience soit éprouvée, vécue en unité, sans concept, dans sa simplicité, telle qu'elle surgit. Et cela, quelle que soit l'expérience. De ce fait, il n'est pas nécessaire de sélectionner une seule expérience, mais cette intimité va devoir être développée pour qu'elle soit présente à chaque instant, avec chaque expérience. Avec l'audition, la vision, l'olfaction, la gustation, la sensation corporelle, la pensée, l'émotion.

    Dans le Satipatthanasuta, le Bouddha distingue quatre sphères d'expérience à utiliser comme moyens pour développer cette intimité et cette sagesse.
    La première est la sphère du corps. Il mentionne d'abord l'intimité, la présence à la respiration. Il mentionne aussi de manière très détaillée la présence aux mouvements du corps - au fait de marcher, de tourner la tête, de tendre un bras, de le plier…et à toutes les activités de la vie quotidienne. Il s'adresse aux moines en disant simplement : quand un moine est debout, il sait : " je suis debout ", quand il tourne la tête, il sait : " je tourne la tête " et ainsi de suite. Et, à la fin de la description de chaque sphère, il dit : cela suffit pour atteindre l'éveil.

    Si nous parvenons à développer cette intimité, extrêmement claire et intense, avec un domaine d'expérience, elle va nous permettre de réaliser ce que nous sommes réellement, ce qu'est le monde dans lequel nous vivons et, d'être ainsi libre de toute confusion, de dépasser tout conditionnement. Il me semble que la manière dont l'intimité avec cette première sphère d'expérience est décrite, montre combien la pratique méditative peut s'inscrire dans la vie quotidienne, à quel point il s'agit d'amener cette qualité de présence dans chaque instant de la vie, et non de s'adonner à une activité étrange ou bizarre. Cela ne veut pas dire que ce soit facile, ni que l'activité quotidienne elle-même, telle que nous la vivons, ne constitue pas, d'une certaine manière, un empêchement.

    La deuxième sphère est la sphère des sensations. Le mot Pali traduit ici par " sensation " a un sens très précis pour lequel nous n'avons pas d'équivalent en français. Ici, "sensation " (vedana en Pali) correspond à la dimension agréable, désagréable ou neutre, existant dans chaque expérience. Le fait d'être présent à cette dimension de l'expérience constitue également une base pour développer l'intimité qui permet d'atteindre l'éveil.

    La troisième sphère est celle des états mentaux. Il va s'agir d'être présent aux réactions de l'esprit, de la conscience. Ces réactions sont, par exemple, la jalousie, l'orgueil, la fierté, l'amour, la compassion, la somnolence… Tous les états d'esprit constituent également une base pour atteindre l'éveil.
    Ainsi, ce qui permet d'atteindre l'éveil n'est pas un état d'esprit parfaitement calme où rien ne se passerait, ou encore fantastiquement ouvert, mais la connaissance de ce que nous éprouvons à chaque instant. C'est au sein de cette connaissance là que nous pouvons atteindre l'éveil et non en excluant tout ce qui nous dérange. C'est en connaissant parfaitement les dimensions de notre humanité, les dimensions conditionnées, que l'on se libère et non en les fuyant, en les évitant. J'y reviendrai.

    De nouveau, nous voyons que la pratique, ici bouddhique - mais je pense que c'est vrai pour toutes les traditions mystiques - ne peut être ancrée que dans un contact intime avec la réalité de ce que nous sommes à chaque instant, sans la saisir d'une manière ou d'une autre, ou même à travers des concepts. Seule une connaissance extrêmement intime de ce que nous sommes nous permettra de dépasser notre conditionnement.

    La quatrième sphère est nommée par un terme extrêmement vaste : dhamma. Ce terme, qui est également vague, s'applique, au fond, au caractère impermanent de tous les phénomènes, au fait que tout change d'instant en instant. Dans ce terme " dhamma " sont inclus ce qu'on appelle les cinq obstacles.

    Les cinq obstacles. Les " cinq obstacles " désignent cinq état mentaux particuliers : le désir, l'aversion, l'agitation, la torpeur et le doute. Ici, le Bouddha les mentionne comme base pour la méditation, comme base pour l'éveil. Cela signifie que ces obstacles sont eux-mêmes une nourriture pour la méditation, qu'ils sont des expériences pouvant mener à l'éveil si nous développons la qualité d'intimité avec eux. Ce ne sont pas des obstacles à rejeter, à éviter, mais des états dont il faut prendre conscience. C'est mentionné très clairement dans le Satipatthanasutta.

    Dans chaque type d'expérience, que ce soit des expériences sensorielles, du corps et de son activité, des qualités agréables, désagréables ou neutres des expériences, des réactions qui se produisent en nous, telles que la jalousie par exemple, ou d'obstacles comme le désir, l'aversion… dans chaque cas l'attitude est la même. Le moine dont l'esprit est troublé par le désir sait : " mon esprit est troublé par le désir " et c'est tout. Il ne se dit pas : " Le pauvre… ", ni se met à réciter les refuges pendant des heures pour se libérer de cet état. Il n'y a pas d'antidote à chercher, car ne n'est pas un mal en soi, c'est la nourriture même de la méditation, une base pour l'éveil. Une question se pose alors : pourquoi, dans le cas du désir, de l'aversion… ces cinq états particuliers sont-ils appelés obstacles, alors qu'il s'agit d'avoir envers eux exactement la même attitude qu'envers la jalousie, une sensation corporelle, l'audition d'un son - c'est-à-dire d'en être complètement conscient ?

    Dans le développement de Vipassana, cette vue tranchante, pénétrante, nous cherchons à développer une intimité exempte de tout concept, de toute distance. Quand il n'y a pas de distance, pas de concept, il n'y a pas non plus de saisie. Les expériences ne peuvent être saisies d'une manière ou d'une autre. Pour saisir, il faudrait quelqu'un qui saisisse et quelque chose qui soit saisi, alors que, dans cette intimité, il n'y a plus l'espace pour ce faire, plus de saisie donc. Et c'est ce qui permet à la sagesse de surgir. De faire l'expérience de la liberté.
    Revenons aux cinq obstacles. Il s'agit, comme nous allons le comprendre, d'obstacles au développement de la concentration et non au développement de la sagesse. Si, par exemple, nous avons choisi de nous concentrer sur le gong, toute autre expérience que celle du gong sera une distraction, un obstacle par conséquent. Dans ce cas, on peut parler d'obstacles. Mais pas dans le cas de la sagesse, puisqu'il s'agit d'être simplement présent à chaque instant, quelle que soit l'expérience. Pour développer la concentration, désir, aversion, agitation, torpeur et doute vont donc être des empêchements, car il n'est pas possible d'être simplement présent comme dans Vipassana.

    Voyez bien ceci : si, étant en train de me concentrer sur un bol, je me dis : " de toute façon, cette méditation ne sert à rien. Je me demande pourquoi je fixe ce bol depuis trois jours. Il est sans intérêt. " A ce même moment, j'ai quitté la sphère de la concentration, je l'ai brisée. Et c'est un obstacle. Alors que si, dans la pratique de Vipassana, un doute surgit et que je sois présent au doute, ce doute est lui-même le support de la méditation. En résumé : on peut donc parler d'obstacles dans le cas de la concentration, mais non dans celui du développement de la sagesse.

    J'ai pris l'exemple du Satipatthanasutta pour montrer l'attitude qui conduit au développement de la sagesse. Je vais maintenant prendre l'exemple d'un autre Sutta qui traite du développement de la concentration, bien que ce ne soit pas sous un angle technique. C'est aussi l'occasion de raconter une histoire.

    Le Bouddha s'était rendu dans un village de la région de Bénarès, où vivaient de nombreux brahmanes hindous. Deux d'entre eux, des jeunes gens, discutaient. Il faut savoir que l'union avec Brahma est connue dans la méditation bouddhique comme étant le fruit du développement de la concentration. Si on développe les plus profondes d'entre elles, notamment celles ayant comme supports l'espace infini, la conscience infinie, " le rien ", puis la sphère où il y a ni perception ni absence de perception - qui sont des concentrations très subtiles, avec des supports de plus en plus immatériels et insaisissables - le fruit en est cette union que l'on pourrait appeler " union avec Brahma ". Les deux jeunes brahmanes ne sont pas d'accord. Chacun dit : c'est mon maître qui a raison, qui connaît le chemin réel pour atteindre l'union avec Brahma, alors que l'autre dit : non, c'est le mien.

    Ayant entendu dire que celui qu'on appelle l'Eveillé, le Bouddha, était à l'orée du village, ils se disent : allons le lui demander. Ceux qui ont voyagé en Inde ont toujours l'impression qu'il y est facile de parler religion avec presque toutes les personnes que l'on rencontre, même avec le guichetier qui vend les tickets de train à la gare. Quand vous dites que vous allez à Bénarès, il y a bien des chances pour qu'il vous demande si vous y allez en pèlerinage ! On a ainsi l'impression que beaucoup de discussions religieuses s'effectuent et qu'il est toujours possible d'aller demander un avis à quelqu'un d'autre. Les deux jeunes brahmanes vont donc voir le Bouddha pour qu'il arbitre leur discussion. Ils ne savent pas à quoi ils s'engagent, mais ils vont vers lui et lui exposent leur discussion.
    Le Bouddha va les interroger d'une manière très socratique. Il va leur faire prendre conscience de ce qui est erroné dans leur manière d'appréhender le problème. Il les questionne.
    - Ton maître a-t-il vu Brahma en face ? A-t-il atteint cette union ?
    Le premier dit non. Il demande au deuxième qui répond non à son tour.
    - Le maître de ton maître a-t-il vu Brahma ?
    Tous deux répondent non.
    - Mais alors, si on remonte sept générations, y a-t-il un maître de la lignée qui ait vu Brahma ?
    Ils répondent encore négativement.
    - N'est-ce pas bizarre, insensé, dit alors le Bouddha, que ces gens qui n'ont pas vu Brahma prétendent vous montrer le chemin qui vous y conduit ?

    Le Bouddha va ensuite utiliser des images assez amusantes. Il prend d'abord une image traditionnelle, en questionnant : n'est-ce pas semblable à un aveugle qui guiderait d'autres aveugles ? Puis encore : Imaginez, dit-il, qu'un homme construise un escalier pour monter au premier étage d'une maison, qui n'est pas encore construite. Il n'a aucune idée d'où se situera la porte de la maison. A l'est, à l'ouest, au nord, au sud ? Il n'en sait rien du tout. Mais il construit quand même son escalier. Est-ce sensé ? Pour les deux brahmanes, la situation est exactement la même ; ils sont en train de construire un escalier sans savoir où la porte se trouvera. Puis, vient une autre image : Imaginez qu'un jeune homme vienne vous dire : je suis amoureux de la plus belle femme de l'Inde, et que vous lui demandiez :
    - Alors comment est-elle ? Est-elle grande ?
    - Je ne sais pas.
    - Est-elle petite ?
    - Je ne sais pas.
    - A-t-elle des cheveux longs, des cheveux courts ?
    - Je ne sais pas.
    - Mais enfin, pourquoi est-elle la plus belle ? L'as-tu vue ?
    - Non, je ne l'ai jamais vue.
    Cet échange reflète bien la promesse de mariage telle qu'elle se pratiquait en
    Inde. Le jeune homme " très brave " était amoureux de " la plus belle femme ", alors qu'il ne l'avait jamais vue.
    Et le Bouddha d'ajouter : la situation est la même avec vos maîtres et vos brahmanes. Ils prétendent vous indiquer le chemin de l'union avec Brahma, alors qu'ils ne l'ont jamais rencontré.


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 11:05

    Ensuite, le Bouddha va aborder un autre aspect. Imaginez, dit-il maintenant, qu'il y ait autour de ce village une large rivière et qu'un marchand doive la traverser pour faire son commerce sur l'autre rive. L'eau est très haute, la rivière pleine à ras bord. Le brave homme, depuis la rive où il se trouve, appelle l'autre rive : viens, viens, rapproche toi, lui dit-il, afin que je puisse traverser. Croyez-vous que cet homme pourra jamais traverser la rivière ? Les deux jeunes brahmanes répondent : non, c'est impossible, il ne le pourra jamais. Le Bouddha enchaîne alors : et bien, c'est la même chose avec vos brahmanes, qui sont ici, et prie Indra, Vishnu, en espérant de cette façon atteindre l'union avec Brahma. C'est semblable à ce que ferait cet homme en appelant l'autre rive dans l'espoir de traverser la rivière. Avec cette image, le Bouddha fait allusion aux rituels. Il ne traite pas de la dévotion, telle qu'on la trouvera plus tardivement dans la tradition hindoue et dans d'autres approches mystiques. Il pointe le rituel pur, tel qu'il était généralement pratiqué dans la tradition brahmanique à cette époque. Il veut dire qu'il n'a pas d'efficacité et qu'avoir complètement et uniquement confiance en lui, sans faire soi-même une partie du chemin est absurde.

    Ensuite, le Bouddha ajoute une nouvelle image : imaginez que ce brave homme qui doit traverser la rivière vienne au bord de l'eau en ayant les mains attachées dans le dos par de lourdes chaînes. Croyez-vous qu'il pourra traverser cette rivière pleine à ras bord ? Réponse des deux jeunes brahmanes : c'est impossible, il ne le pourra pas. Le Bouddha dit alors : les lourdes chaînes qui attachent les mains dans le dos sont les objets des cinq sens. L'intérêt pour les objets des cinq sens, pour ce qui est vu, goûté, touché, senti, entendu, est comme le fait d'avoir les mains enchaînées dans le dos. Avec cette nouvelle image, le Bouddha donne une indication concernant le développement de la concentration. Il est en train d'enseigner comment il est possible d'atteindre l'union avec Brahma. Il veut dire que si on est attiré par les objets des sens qui se présentent à nous, et qui constituent des distractions, il ne sera pas possible de traverser la rivière pour s'unir à Brahma. Par conséquent, délaissez l'intérêt pour les objets des sens.

    Et voici encore une autre image : si un homme arrivant au bord de la rivière qu'il doit traverser pour faire un travail important sur l'autre rive, se couche sur place et s'endort, pensez-vous qu'il la traversera ? Evidemment non, disent-ils, il ne traversera jamais la rivière. Le Bouddha dit alors : la personne qui est sous l'emprise des cinq obstacles est comme celle qui viendrait au bord de la rivière et s'y endormirait. Les cinq obstacles sont ici clairement mentionnés comme des obstacles au développement de la concentration, empêchant d'atteindre les degrés d'absorption extrêmement profonds menant à l'union avec Brahma.

    En revenant sur les cinq obstacles nous pouvons comprendre qu'ils sont nécessairement emprunts d'ignorance et de confusion. Sans l'une et l'autre, ils n'auraient pas un tel pouvoir d'empêchement.

    Le désir est une surévaluation des qualités positives, du degré de satisfaction que l'objet, la circonstance, la personne désirée sont susceptibles d'apporter. Il projette la satisfaction attendue sur l'objet, comme si elle s'y trouvait objectivement. Cette méprise, cette confusion, se traduit par une fausse appréhension de la situation, de l'objet, de la personne - accompagnée d'une forte saisie, caractéristique de l'attachement.
    L'aversion procède de la même façon, mais à l'inverse, en surévaluant les qualités négatives. C'est bien connu : si un de nos amis est fâché avec quelqu'un d'autre, nous avons l'idée que cette personne est la cause des problèmes et que, sans elle, notre ami n'en aurait pas. Tout se passe comme si l'insatisfaction résidait dans la personne, la situation ou l'objet extérieur. De nouveau, la surévaluation traduit un degré de confusion, elle-même issue de la part d'ignorance qui la sous-tend.

    Maintenant, dans notre méditation, comment désir et aversion vont-ils s'exprimer ? L'aversion est la réaction qui surgit en moi si une expérience désagréable se produit - une douleur en un endroit du corps, par exemple. L'aversion a des chances d'être la première réaction qui apparaisse. Elle fait que j'ai envie de me couper, de ne pas sentir, de ne pas être présent à la sensation désagréable. Elle m'éloigne de ce qui est pourtant présent : la douleur. Peut-être l'avez-vous éprouvé : quand une douleur est très souvent là, elle est manifestement très présente, et il ne suffit pas de lui dire de s'en aller pour qu'elle disparaisse. Dans l'aversion il y a donc le rejet, une manière de se tenir à distance, de ne pas éprouver une expérience douloureuse.
    L'attachement, le désir, à l'inverse, serait de se dire : " Pourquoi ma méditation n'est-elle pas calme, pleine de béatitude, au lieu d'éprouver cette douleur. Cela vaudrait vraiment la peine ! ". Le désir consiste donc à aspirer à une expérience plus agréable et satisfaisante que celle qui se produit. Et ce désir va amener à l'esprit quelque chose qui n'y est pas. Dans les deux cas, il est clair que la qualité de ma concentration, ou même celle de ma présence, va souffrir du désir ou de l'aversion.
    Quant à l'agitation, c'est un état d'esprit qui passe sans repos d'un objet à un autre. Imaginez que des idées me passent par la tête au sujet de ce que je vais faire pendant mes vacances, au cours des dix prochaines années - l'esprit ne pouvant se poser, sur une réflexion, ou sur un type d'expérience, mais en changeant constamment, à l'image d'un singe qui sauterait de branche en branche. Il est clair que cette agitation ne permet pas le calme, l'intimité nécessaire au développement de la méditation.


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 11:07

    A l'inverse, la torpeur est un manque d'énergie, un manque de clarté qui fait que, même sans distraction, même en étant en contact, par exemple, avec les sensations dans l'abdomen, je ne les perçoive pas clairement. L'image souvent utilisée dans les textes est celle-ci : c'est comme si, le soir, fatigué, lisant dans un livre quatre fois la même phrase je me demandais : mais, qu'étais-je donc en train de lire ? Je n'ai pas enregistré. Pourtant, ce n'est pas que l'on penserait à autre chose, mais il y a un manque de clarté, qui peut prendre des aspects très subtils et être confondu avec le calme, donnant à croire qu'il s'agit d'une méditation bien stable, d'un répit dans l'agitation. C'est une voie de garage : le manque de clarté entraîne le manque d'intimité. Si on s'en arrête là, pensant qu'il s'agit d'une excellente méditation, sans être conscient de la dimension de torpeur, le développement ne pourra pas se faire. Bien sûr, si la tête tombe, le manque d'énergie est évident ! Personne ne se leurre. Mais cela peut être beaucoup plus subtil : l'esprit semble se calmer, il y a quelque chose d'agréable dans le sens ou un calme est bien éprouvé, mais la clarté manque.

    En ce qui concerne le doute, le Bouddha dit que c'est l'obstacle le plus difficile à surmonter. Pourquoi ?
    Parce ce qu'il est possible de prendre conscience de chacun des autres obstacles et, peut être, de continuer la méditation en étant attentif au désir, à l'aversion, à l'agitation, à la torpeur. Mais, le doute nous fait quitter la méditation. Lorsqu'il surgit, au lieu de chercher à lui trouver une solution, nous nous arrêtons de méditer. En général, il apparaît sous un déguisement, comme une manière intelligente de réfléchir, avec un élément présomptueux. Fondé sur la réflexion mentale, le doute s'auto-justifie : " de toute façon, cette technique ne marche pas. Cela ne sert à rien ! ". A l'évidence, lorsque le doute tourne dans la tête, nous ne sommes pas en contact avec l'instant présent, avec les sensations corporelles. Son bruit empêche le contact. Et le doute paraît avoir raison : il est clair que cela ne marche pas tant qu'il est là ! C'est donc bien le plus difficile des obstacles, car il prend l'aspect d'une pseudo-sagesse et s'auto-justifie.

    Dans ses formes, il peut porter sur l'enseignant, sur l'enseignement, sur la technique et sur le sujet méditant. Quelques exemples :
    " Sur l'enseignant : " Il ne sait pas de quoi il parle. Cela ne sert à rien… "
    " Sur l'enseignement : " Moi, j'ai lu des livres. Ce n'est pas comme cela… "
    " Sur la technique : " Ce n'est pas la technique qui me convient… "
    " Sur le sujet méditant : " De toute façon, ce n'est pas le bon moment. Je suis sûr que ce sera mieux la semaine prochaine… le prochain week-end. Le week-end de la Pentecôte, ce n'est jamais le bon moment pour méditer… " ou encore " Ce sera beaucoup mieux l'année prochaine. Maintenant, avec tout ce qui m'arrive, ce n'est pas le bon moment… "

    Le résultat final est de se lever et de sortir de la salle de méditation. Que ce soit parce que " jamais je n'y arriverai, c'est trop difficile ce truc là ", ou parce que " c'est fait pour les orientaux, mais pour les européens, cela ne marche pas " ou pour toute autre raison, je me lève et je m'en vais. Quelles que soient les justifications, elles aboutissent à nous arrêter de méditer.
    Mais attention, cela ne veut pas dire que chaque fois que quelqu'un se met à parler, il faille se dire : " Oui, oui, c'est très bien ce qu'il dit " et que le doute ne puisse être utilisé à bon escient. Mais il y a un moment pour tout. Au besoin, doutez avant de venir à une retraite. Doutez après, peut-être. Mais pendant que vous méditez, essayez de méditer !

    Les Obstacles et la méditation Vipassana.
    En revenant maintenant à la pratique de Vipassana, nous avons vu qu'aucune des expériences qui surgissent ne peut réellement être, en elle-même, un obstacle, puisqu'il suffit d'être présent au désir, à l'aversion, à l'agitation… et même au doute. Prendre conscience des trains de pensées qu'ils constituent, de leurs qualités particulières, est suffisant pour rester dans la méditation. Demandons-nous alors ce qui serait réellement un obstacle.

    Dans l'introduction à la méditation, j'ai distingué deux aspects :
    L'état d'esprit,
    La technique.
    Il serait possible d'en déduire que deux types d'obstacles peuvent exister : l'un ayant trait à l'état d'esprit, l'autre à la technique.

    L'obstacle quant à la technique. Ce serait une mauvaise compréhension du processus méditatif. Par exemple : si on pensait qu'il s'agisse de projeter notre attention à l'extérieur et de faire l'inventaire de tous les noms d'oiseaux qu'il est possible d'entendre, ce ne serait pas la pratique de Vipassana. Ce serait une autre pratique, intéressante certainement, mais n'entrant pas dans le cadre de notre méditation. L'obstacle viendrait ainsi d'une mauvaise compréhension de la technique. Il faut dire qu'il y a mille manières de la comprendre et qu'on pourrait toujours poser des questions pour en avoir une vision claire !

    L'obstacle quant à l'état d'esprit. De quoi pourrait-il s'agir ? Si nous avons compris que nous allons avant tout développer une qualité de présence à chaque instant, ne pas vouloir être présent serait un obstacle quant à l'état d'esprit. C'est évident ! En venant à une session de méditation où on me dit : soyez présent", si mon attitude intérieure consiste à ne pas vouloir l'être, je suis sous l'effet d'une double contrainte. Cela me semble être manifestement un obstacle. Je me souviens d'avoir conduit un stage de présence au geste pour des élèves infirmes. Quelques-uns m'ont dit : " Mais nous, on n'a pas du tout envie d'être présents, ça ne sert à rien. On a envie de rêver, d'avoir notre musique… " Evidement, ils n'avaient pas demandé à participer au stage ! Ils avaient donc raison. L'obstacle était tel qu'ils ont pu aller jouer dans la cour, cela ne servait à rien de les obliger à être présents, alors qu'ils n'en n'avaient pas envie. Par conséquent, dans notre pratique, si l'attitude de ne pas vouloir être présent existait, je crois qu'on pourrait réellement parler d'un obstacle. D'un obstacle spirituel, d'un obstacle essentiel.


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 11:07

    Maintenant, il paraît évident que si quelqu'un se donne la peine de s'asseoir dans une posture inhabituelle, sans bouger pendant aussi longtemps que possible, l'intention d'être présent est là, au moins consciemment. Ne serait-il pas absurde de se dire : " Moi, de toute façon, cela ne m'intéresse pas, je n'ai pas envie d'être présent ", et de venir passer le week-end ici, simplement pour s'asseoir en silence ? Il y a donc, certainement, chez chacun de nous l'intention consciente d'être présent, avec peut-être même la compréhension de l'immense bénéfice qui en découle. Mais, cela ne veut pas dire que toutes les parties de notre être participent à cette intention. Il est possible que certaines d'entre elles n'en aient pas envie. Et c'est là que l'obstacle réside réellement.

    Je vais essayer d'approfondir quelque peu cet aspect car il me semble très important quant à ce qui se déroule dans la méditation et quant aux obstacles pouvant être rencontrés et parfois non compris. Je vais utiliser un schéma caricatural. Je viens pour méditer et j'observe beaucoup de pensées, énormément de pensées, constamment. Bravement, j'essaie alors de revenir aux sensations corporelles, mais énormément de pensées me viennent toujours. J'aurais pu choisir la torpeur comme exemple, mais restons avec les pensées. Il se peut qu' il y ait en moi des zones de tension. Imaginons qu'il en soit ainsi dans la poitrine. Ces zones sont douloureuses. D'une certaine manière, je n'ai pas envie d'être en contact avec elles. Donc autant occuper ma présence, ma conscience, à quelque chose faisant moins mal, que je gère dans une certaine mesure, à travers la pensée, la réflexion, plutôt que de risquer d'être en contact avec mon corps et ses zones de tension.

    Maintenant, fatigué de ce flot de pensées, je remarque finalement, lorsque je suis en contact avec mon corps, que c'est de manière douloureuse et pas nécessairement en raison de douleurs liées à la posture, mais à cause de douleurs plus profondes. Je remarque, par exemple, cette tension dans la poitrine et m'y intéresse maintenant en me disant : " tiens, c'est bizarre, qu'est ce que c'est que cette tension dans la poitrine ? ". Alors, je l'observe, j'en fais l'expérience.

    Il y a, à ce moment, deux façons d'en être conscient. La première est " j'ai des tensions dans la poitrine ", un peu comme si j'en étais la victime - quelque chose du style : " Pas de chance, il y a des tensions dans la poitrine ". Mais, cette manière de prendre les choses, est une façon de ne pas assumer le fait que " je me tends ", et qu'il n'y ait pas de tensions naissant d'elles-mêmes. Ces tensions ne viennent pas toutes seules. Elles ne viennent pas de l'extérieur, parce que quelqu'un me regarderait trop intensément ou je ne sais quoi… Elles sont là, parce que je me tends.

    Quand j'arrive ainsi à prendre conscience du fait que les tensions proviennent de ce que je me tends, j'en prends en quelque sorte la responsabilité, je développe ma qualité de présence - voyez bien la différence entre : " j'ai des tensions " et " je me tends ". C'est alors que je commence à être présent à ces tensions, présent à l'intention (de me tendre), présent à la conscience qui se trouve là, dans la poitrine, et qui tend cette zone du corps. La qualité de présence est donc meilleure et, de plus, j'assume réellement ce qui se passe, qui était auparavant inconscient : le fait de me tendre.

    Parvenu à ce point - à l'expérience consciente que je me tends - il se peut que je me dise à un moment : " Mais, pourquoi est-ce que je me tends ? Pourquoi ne cesserais-je pas de me tendre ?", et que je me rende compte tout à coup que ce n'est pas aussi simple, que sous ce " je me tends ", il existe peut-être une angoisse immense ou une immense tristesse, faisant que je me tends pour ne pas faire l'expérience de la peur ou de la tristesse qui est en dessous.

    Etant ainsi passé d'une étape à l'autre, lorsque je remarque cette angoisse ou cette tristesse - quelle que soit l'émotion dont il s'agisse - si je parviens à lui être présent, je pourrais alors honnêtement constater que je veux être présent. Auparavant, inconsciemment, le fait était que je ne le voulais pas, afin d'éviter l'émotion douloureuse.
    Nous pouvons donc méditer sincèrement en essayant d'être présent, alors qu'une partie de nous-même ne le veut pas. C'est cela le véritable obstacle. Il peut s'exprimer sous forme de pensées, d'agitation, de désir, d'aversion ou de doute - qui sont les aspects que l'obstacle ou la résistance va prendre. Mais, l'obstacle en lui-même, est le fait inconscient de ne pas vouloir être présent.
    Si nous voulons développer une connaissance profonde de nous-même, il s'agira donc d'amener ces zones à la lumière. Sinon, nous allons être pris dans cette double contrainte, avec le sentiment d'une méditation difficile, laborieuse, car tout en essayant honnêtement d'être présent, une partie inconsciente de nous-même ne le veut pas.

    Ce matin, j'ai parlé du guerrier. Le courage requis est celui de mettre en lumière ces zones d'ombre, ces zones difficiles. Cela demande du doigté, de ne pas agir avec violence, mais au contraire avec beaucoup de sensibilité, de respecter la peur de toucher des émotions plus profondes. L'obstacle réel, à mon avis, est donc le désir inconscient de ne pas être présent, justifié par des zones désagréables, qui font peur, par des émotions profondes.

    Dans notre pratique, nous aurons à amener à la conscience ces différents éléments. Tout d'abord, ne pas se positionner en victime. Quand on est victime : " j'ai des tensions, pas de chance ", ce placement ne permet pas d'assumer la responsabilité du fait de se tendre. En ce cas, le désir de ne pas être présent va rester dans l'inconscient. Baudelaire, dans un poème - je ne me rappelle pas beaucoup de poésies - mais ces quelques vers me sont restés dans la tête. Ils illustrent bien, me semble-t-il, ce dont il s'agit : " je suis la plaie et le couteau, les membres et la roue, le soufflet et la joue, la victime et le bourreau ". C'est exactement ce qui se passe en méditation. C'est-à-dire qu'on ne peut pas être victime. Si on est victime, on est la victime de soi-même. C'est donc dans la mesure où nous allons complètement assumer le fait de nous tendre, d'éviter, qu'il sera possible d'amener à la lumière les zones douloureuses, de les mettre dans la présence. Alors un sentiment de présence total, complet, pourra être développé, non manipulé inconsciemment par les zones d'ombre dont on a peur.

    En résumé, je pense que les obstacles, avant d'être le désir, l'aversion, l'agitation, la torpeur et le doute, proviennent surtout du fait qu'il y a en nous des zones que nous évitons, soit parce qu'elles sont douloureuses soit car elles constituent un plus grand défi. Si nous ne sommes pas conscients de ce mécanisme, nous sommes dans une position ambiguë, voulant à la fois être présents et finalement ne le voulant pas. C'est seulement lorsqu'on parvient à faire l'unité dans notre attitude que la méditation peut s'approfondir et que ces différents écueils peuvent être dépassés. Pour beaucoup d'entre nous, de telles zones peuvent surgir à différents moments, sous d'autres aspects et pour d'autres raisons. Il s'agira d'en prendre conscience avec beaucoup de sensibilité.

    Je crois que c'est complètement normal et juste que la méditation se passe ainsi. Si elle ne demandait pas la mise en lumière des zones d'ombre, il serait possible d'achever son parcours méditatif tout en laissant à l'intérieur de soi-même une quantité de choses troubles et d'être à la fois éveillé et névrotique. Il est donc bien normal que dans le processus méditatif, ces zones doivent être amenées à la conscience, pour pouvoir s'en libérer et atteindre un degré de présence claire - sans trouble.


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 11:07

    Hier en fin d'après-midi, j'ai commencé à parler de la différence entre Samatha et Vipassana, entre la concentration et la sagesse. Pour être plus précis, la traduction de Vipassana est : vision pénétrante, menant à la sagesse. J'ai également donné quelques indications concernant le développement de la concentration, à partir d'un discours du Bouddha traitant en particulier des obstacles qui empêchent son développement. Je voudrais aujourd'hui ajouter quelques éléments au sujet de la sagesse, car j'ai été trop bref à son sujet.

    Imaginez d'abord qu'un texte soit écrit sur le mur d'une pièce. Celle-ci est dans l'obscurité. Il est impossible de lire le texte. Maintenant, nous allumons une bougie dans la pièce. Deux situations peuvent exister. Dans la première, la flamme est stable. La lumière éclaire la pièce et permet de lire le texte. Dans la seconde, à cause des courants d'air, la flamme bouge constamment. La lumière vacille et, malgré sa présence, le texte ne peut être lu. La concentration correspond à la stabilité de la flamme. Une question se pose alors : quel est le texte à lire à la lumière de la concentration ? Qu'allons-nous pouvoir réaliser, comprendre, voir clairement, selon le sens du mot Vipassana ?

    Ces derniers jours, j'ai abondamment utilisé le terme " intimité " pour parler de ce qui est mis en jeu dans la méditation. Cette intimité est le fait de pénétrer à l'intérieur de l'expérience sans s'arrêter à sa surface. C'est le concept, l'image qui nous laissent à la surface de l'expérience. Si on projette un concept ou une image sur une expérience, on se relie à eux et non à l'expérience elle-même, ce qui ne permet pas l'intimité.
    L'intimité est donc le fait de faire l'expérience sans intermédiaire, de se relier à elle sans concept. Toute notion de distance entre le méditant et l'expérience est créée par le mental, par le concept. Seuls un concept, une image peuvent créer cette distance. La pratique méditative va avoir pour effet de revenir à la simplicité, à un état situé avant que les concepts viennent interpréter les expériences.

    Dans la tradition mystique chrétienne il est dit : si on connaît Dieu à l'aide d'un moyen, d'une technique, on connaît la technique, mais on ne connaît pas Dieu. Cela veut dire que n'importe quel intermédiaire qui se situerait entre le mystique et l'expérience de Dieu constituerait un voile. De même, dans toute expérience, s'il y a un intermédiaire - concept, image - c'est un voile qui empêche la vision pénétrante, l'intimité, la réalisation profonde de la nature de l'expérience.

    J'ai évoqué le concept du temps que nous utilisons constamment pour structurer nos expériences quotidiennes. Si la notion du temps intervient dans notre méditation, si nous l'inscrivons dans la durée, cela revient à placer un voile permanent dans notre pratique. Il rend l'intimité impossible à quelque moment que ce soit.

    Une autre notion récurrente va également créer un voile permanent et rendre l'intimité impossible : c'est la distinction qui existerait entre un sujet et un objet. C'est le processus qui s'attache à faire des expériences avec la notion de moi, à s'approprier les expériences comme si elles étaient la possession d'un moi, ou la caractéristique d'un moi. Si cette structure existe dans l'expérience, cela signifie qu'il y a l'expérience plus un concept - la notion qui s'appelle " moi ". Dans ce cas, la notion de " moi " est le voile qui empêche l'intimité et maintient l'idée de dualité. L'intimité, je le répète, n'admet pas de dualité, mais est au contraire l'unité dans l'expérience.

    Evidemment, la projection de la notion de moi dans l'expérience est très forte. Elle possède toute la force de l'habitude. Beaucoup d'attachements lui sont liés, que nous allons pouvoir explorer dans la pratique méditative, non point en partant en guerre contre le moi - ce serait ridicule - mais en s' autorisant, en se rendant disponible à une intimité qui ne croit pas, ou ne s'appuie pas sur la nécessité du moi. On ne le nie pas, mais on se rend disponible : peut-être est-il possible de faire l'expérience sans qu'elle dépende du moi ?
    Pour prendre un exemple : si le vent souffle, on ne cherche pas nécessairement un agent qui serait à l'origine du vent - un souffleur, qui soufflerait le vent. Le vent souffle, c'est tout. La dualité souffleur-vent n'est pas introduite. Pareillement, dans nos expériences, même si on dit " je vois ", " j'entends ", la vision voit, l'audition entend, sans qu'une notion de moi aide en rien. Au contraire, elle vient empêcher une vision ou une audition plus intimes. Ajoutée dans l'expérience elle-même, la notion du moi est une entrave, un corps étranger.

    En général, dans l'expérience des émotions : tristesse, colère etc.… les émotions négatives sont plus un problème pour nous que les émotions positives : il est rare que quelqu'un se plaigne d'éprouver trop de joie, trop de béatitude, bien que cela puisse arriver. Il serait possible de s'attacher et de s'identifier à de telles expériences et peut-être pourraient-elles devenir un problème. Un problème plus subtil, beaucoup plus difficile à reconnaître que l'identification à la tristesse ou à la colère…
    Cette identification à l'émotion est un empêchement à l'intimité. Elle ne permet pas à l'émotion de terminer son cycle de vie et d'éclore dans quelque chose d'autre : elle rend le processus rigide. L'émotion demeure sans pouvoir terminer sa vie, ni se dissoudre dans une qualité de présence. Pour explorer cet aspect, la somnolence peut être très utile. Si, lorsque l'expérience se produit, je m'y attache : " je " suis somnolent , " je " suis fatigué … à ce moment, une sorte de solidification de l'expérience de somnolence intervient. C'est comme si tout mon être se résumait à cette somnolence, alors qu'elle n'est qu'une qualité particulière de présence. En elle-même, la somnolence n'a aucune capacité de nuire à la présence, de la transformer en quelque chose d'autre.


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    Message par petit_caillou Dim 15 Juil 2012, 11:08

    Prenons un exemple. Nous allons voir un étang à l'orée d'un bois. Imaginons que nous soyons en automne. Si nous regardons l'étang, les feuilles de la forêt et les nuages du ciel vont d'abord nous apparaître. Une attention plus précise est nécessaire pour ne pas nous laisser distraire par leurs réflexions à la surface de l'eau, pour percevoir l'étang lui-même. Distraits par la réflexion des feuilles, des arbres, des nuages, nous demeurons dans leur perception, sans nous relier à l'étang. De même manière, dans l'expérience de la somnolence, si nous restons uniquement reliés, fascinés ou ennuyés par cette expérience, il nous est impossible de nous relier à la présence, présence qui se manifeste sous forme de somnolence.
    Regardez la statue dans cette salle, vous ne pouvez pas dire qu'elle ait somnolé toute la matinée. Enfin, je ne le crois pas ! Sans conscience, il ne peut y avoir de somnolence. La somnolence n'est qu'une teinte prise par la présence, sans que celle-ci en soit altérée. Si donc, par la pratique, nous apprenons à rester en intimité avec la présence, sans être fascinés par la forme qu'elle prend - la somnolence dans cet exemple - nous pourrons rester parfaitement présents sans que la somnolence constitue le moins du monde un obstacle. Tout comme nous pourrons voir l'étang, sans avoir besoin de couper la forêt.

    L'exemple de la somnolence nous permet aussi de comprendre comment méditer avec les émotions.
    Lorsqu'il y a de la tristesse, de la colère… si je reste fasciné par la dimension, l'aspect tristesse, colère, il est difficile de développer l'intimité qui va leur permettre d'achever leur vie pour ainsi dire, de passer à autre chose, de débloquer l'énergie contenue dans l'émotion -énergie qui est nécessaire à la présence. En général, face aux émotions, nous adoptons l'une des deux attitudes suivantes :
    La première consiste à s'en tenir à distance, car l'émotion fait mal. L'identification s'effectue non pas avec l'émotion mais avec celui, celle qui se tient à distance. Cela revient à se désolidariser de l'émotion en s'identifiant à une autre partie de soi-même. C'est une sorte d'anesthésie pour éviter de sentir. Evidemment, ce n'est pas le chemin équilibré qu'il est judicieux de suivre dans une voie spirituelle. L'anesthésie nous rend un peu semblable aux plantes ou aux légumes ! Même si, au premier abord, on peut paraître " cool ou zen ", ce n'est pas du tout la manière de développer la qualité de présence menant à la sagesse ou à la liberté. Donc, cette première attitude consiste à s'identifier au possesseur et à se désolidariser de l'émotion.
    La deuxième attitude, au contraire, consiste à s'identifier à l'émotion : je suis triste, je suis en colère… Cette forme d'identification à le pouvoir de cristalliser toute l'attention, toute l'énergie de la conscience dans le phénomène auquel nous nous identifions : colère, tristesse… par le moyen du concept, de la notion de moi. Nous devenons la colère, la tristesse… Dans cet état, il n'est pas possible de rester sensible, ouvert à la dimension de présence, de conscience qui est la nature ou l'essence de l'émotion. Ainsi, dans ces deux attitudes, l'identification joue en sens contraire. Mais, dans un cas comme dans l'autre, l'équilibre est absent.

    La manière méditative consiste à rester relié à l'émotion : tristesse, colère, jalousie, joie, béatitude… ou toute autre, à travers la qualité de présence qu'elle traduit, présence qui, seule, permet à l'émotion d'exister. Ce faisant, l'émotion perd son pouvoir contraignant. Elle n'a plus d'importance. L'attachement, cette forme particulière de saisie, n'étant plus là, l'émotion peut achever son cycle d'existence et libérer l'énergie de conscience qu'elle avait captée.
    Il n'est pas besoin d'un état d'esprit ingénieux mais de doigté. C'est un travail d'artiste et non d'artisan. Il consiste à ne pas se laisser prendre par les mouvements habituels d'identification à l'émotion ou de distanciation pour l'éviter, mais à rester présent à l'émotion elle-même.

    Cette intimité profonde avec les expériences émotionnelles, sans être captivé par leurs formes ni par leurs manifestations, signifie qu'il n'y a pas d'attachement aux idées, concepts et réactions qui se produisent en nous en relation avec les circonstances, les évènements et les rencontres. Il est alors possible de faire l'expérience méditative dépourvue de tout concept.
    Posons-nous maintenant la question de ce que veut dire, techniquement parlant, développer la sagesse ? Est-ce découvrir quelque chose d'extraordinaire, exprimable en termes poétiques ou que nous allons retrouver dans les discours du Bouddha ? Techniquement, qu'est-ce que cela veut dire ? - quelle que soit la tradition bouddhique selon laquelle nous pratiquions. Il serait sûrement possible de dire : quelle que soit la tradition mystique, mais tenons-nous en aux traditions bouddhiques. Qu'il s'agisse de méditations zen, tibétaine, vipassana ou autres, elles ont certainement quelque chose en commun dans le développement de la sagesse. Cette chose essentielle est l'absence de saisie. C'est très clairement exprimé dans les différentes voies. Evidemment, ayant dit cela, nous allons nous demander : que veut exactement dire " saisir " ? On a tout dit et on n'a rien dit. Qu'est-ce que cela veut dire ?

    Il est clair que nous n'essayons que très rarement de saisir une expérience ou une personne, ou de nous attacher à une expérience ou à une personne. Si c'était réellement le cas, cela voudrait dire, littéralement, prendre une corde et s'attacher à la personne ! Evidemment, c'est très rare ! S'attacher à une personne, à une expérience, ou à autre chose est de l'ordre du concept. Nous nous attachons mentalement. Nous nous attachons par un concept à une personne, à l'image que nous en avons, à une situation, à une expérience. A " saisir " un bon repas, ou à s'y " attacher ", on se fatiguerait rapidement ! En revanche, on peut très bien saisir mentalement l'image que nous avons d'un bon repas, d'une soirée ou d'une expérience. " Saisir " à donc toujours affaire avec le monde conceptuel, sauf dans les rares cas où nous saisissons réellement avec les mains, les dents, une corde etc.… Nous saisissons donc toujours à l'aide d'un concept. Par conséquent, ne pas saisir, c'est revenir à un niveau d'expérience antérieur à tout concept. Sans concept, il n'y a pas de possibilité de saisir puisqu'on n'a rien pour saisir.

    Cela permet de comprendre pourquoi l'expérience méditative, lorsqu'elle dépasse le niveau conceptuel, ne peut être exprimée en mots, puisque les mots, les concepts sont le propre de la saisie. Vouloir rendre compte d'une expérience méditative de liberté à l'aide de concepts, voudrait dire utiliser le propre du monde de la saisie pour exprimer ce qui est au-delà de toute saisie. C'est incompatible. Seuls les poètes, les mystiques, habiles dans l'emploi d'un langage qui se contredit, qui bafouent les règles du langage, vont tenter d'exprimer l'inexprimable par des mots. Mais, avec un usage ordinaire du langage, il n'est pas possible de décrire l'expérience méditative qui est au-delà du concept.
    Tout le sens de notre méditation revient donc, techniquement, à ne pas saisir - ce qui veut aussi dire ne pas conceptualiser. Dans la concentration il y a une saisie. Pour se concentrer, il faut saisir quelque chose, à l'exclusion de toute autre chose. Ce qui est saisi sera utile, mais devra en fin de compte être également dépassé. La concentration ne peut jamais mener à la liberté, puisqu'elle cultive une saisie particulière.

    Source: http://www.vipassana.fr/Textes/CharlesGenoud_4LaSagesse.htm


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    Message par lotuszen Jeu 19 Juil 2012, 18:35

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    Message par Pema Gyaltshen Jeu 19 Juil 2012, 19:50

    QUESTIONNER NOTRE VISION DU MONDE  586300 Merci !


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